2006
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Yan Laborie, « Le château des Albret à Labrit (Landes) », Archéologie du Midi Médiéval, ID : 10.3406/amime.2006.1595
Edifié au coeur du domaine éponyme de la famille d’Albret, sur la marge nord de la vicomté de Marsan, le castrum de Lebreto paraissait représentatif des créations castrales d’origine privée sur lesquelles, après l’an Mil, s’appuyèrent de grands propriétaires fonciers pour localement étendre leur domination et s’emparer de prérogatives banales. Contrairement à toute attente, les données chronologiques acquises par l’archéologie apportent la preuve que l’édification de ce château type “ motte et basse-cour ” intervint beaucoup plus tardivement, vers 1225-1230. L’émergence des Albret, dès le XIe s., dans le groupe des nobiles et des principes de l’entourage ducal, ne serait donc pas, semble-t-il, liée à une émancipation appuyée sur l’initiative d’une création castrale. Marginalisant le rôle du château dans l’ascension de ce lignage, ce constat laisse envisager qu’en Gascogne le pouvoir ducal dut conserver la capacité de s’attacher la fidélité des lignages les plus éminents tout en limitant leurs velléités d’ériger des fortifications dans leurs domaines. Deux siècles après la mutation institutionnelle et sociale des Xe-XIe s., alors que les Albret en possession de plusieurs autres seigneuries, réparties en Bazadais et Condomois, étaient en passe de se hisser au plus haut rang de l’aristocratie du duché, la construction du castrum de Labrit sur les terres de leur domaine d’origine releva, par conséquent, non d’une logique d’autonomisation du pouvoir de cette famille, mais de sa préoccupation de valoriser, au plan politique et économique, ses ancestrales possessions foncières landaises. Dans le contexte spécifique de l’espace des Grandes Landes de Gascogne, dont la colonisation restait inachevée au début du XIIIe s., Labrit procure ainsi l’exemple d’un castrum “ secondaire ” fondé pour resserrer l’encadrement d’une vaste seigneurie, géographiquement dispersée, et appuyer la mise en valeur de terres neuves.