1996
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J. Mbembé, « La « chose » et ses doubles dans la caricature camerounaise. », Cahiers d'Études africaines, ID : 10.3406/cea.1996.2005
Ce texte analyse l'image comme écriture, non seulement parce que la caricature camerounaise est un parfait mélange de l'image et du mot, du mot et du son (donc de la parole), mais aussi parce qu'elle s'immisce constamment dans l'espace pictural pour y introduire le mouvement. Elle est aussi politiquement un métissage du local et du global par son français créole, par son insistance à mettre l'accent sur les mécanismes, situés dans l'espace politique global, qui agissent sur les événements locaux. La caricature semble s'identifier à une rumeur saisie sur le vif qui, pour ne pas devenir mot discipliné, a absolument besoin de l'image pour continuer à être un événement, pour échapper au risque de devenir le double de la vie qui se présente comme son portrait. L'esthétique de cette écriture, qui s'obstine à faire de l'indiscipline le fondement de sa pertinence, repose essentiellement sur l'audace de dire, de montrer, ce qui ne devrait être ni dit, ni montré publiquement. Toutes choses que la caricature peut se permettre puisque, comme la rumeur, elle ne prétend pas reproduire le monde de façon mimétique ; elle n'en produit qu'un double dont l'éthique permet de montrer ce que tout le monde sait mais que personne n'ose dire.