2002
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Laurent Garde, « Loup des villes, loup des champs », Le Monde alpin et rhodanien. Revue régionale d’ethnologie, ID : 10.3406/mar.2002.1774
Le retour du loup en France a cristallisé en un conflit violent l'antagonisme entre «ruraux» et «écologistes». Deux représentations inconciliables s'affrontent, dont les sources sont de nature très différente : le loup proposé au grand public vient d'ailleurs (le savoir biologique sur le loup nord-américain) et d'avant (le récit historique sur le loup européen) ; le loup des éleveurs est celui que leur racontent leurs brebis. La controverse sur le retour du loup, naturel pour les uns ou organisé pour les autres, reflète deux perceptions antagonistes de la montagne, comme espace naturel ou culturel. La construction contemporaine du loup proposée par ses défenseurs s'articule autour de deux pivots fondamentaux : la «peur du loup » et le rôle des chiens errants. Ces deux thèmes leur permettent d'«innocenter» le bup et de disqualifier ses adversaires, en tendant à dénier attitude rationnelle aux opposants au loup et compétence professionnelle aux éleveurs. Il se pourrait bien, pourtant, que le loup mythique resurgisse là où personne ne l'attendait. Mais les enjeux ici ne sont pas scientifiques, ils sont sociologiques et portent sur de nouveaux modes d'appropriation de l'espace montagnard par un processus volontariste d'«ensauvagement».