2013
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Marie-Claude Perrin-Chenour, « Jamaica Kincaid's regressive writing », Recherches anglaises et nord-américaines (documents), ID : 10.3406/ranam.2013.1456
Cet article examine «l’écriture régressive» de Jamaica Kincaid dans son roman The Autobiography of My Mother. La critique analyse généralement ce texte comme la quête de l’île perdue des origines, celle de la mère de la narratrice, Indienne Caraibe, dont la communauté a largement disparue. La recherche de cette «vanishing race», à travers l’image floue et estompée de la mère, qui n’apparaît que dans les rêves de l’héroïne, est bien la tentative de recréation d’une «imagined community». Cependant la remontée à rebours de l’Histoire, le désir de retrouver le passé d’avant la colonisation se heurtent à la reconnaissance déchirante de l’impossibilité du projet, à la nécessité de composer avec l’Histoire, aussi douloureuse soit-elle. La paralysie qu’entraîne cette constatation enferme l’héroïne dans une «I-land» où l’absence de communauté réelle la laisse seule avec son imaginaire et où le désir de recréer un lien fantasmé ne conduit paradoxalement qu’à l’individualisme et à la solitude. Cet article s’attache à analyser les différentes facettes de cette écriture de la stagnation et du repli sur soi, les stratégies narratives qui traduisent, dans une prose entêtante et incantatoire, l’oscillation permanente entre régression, retour à la source du récit et volonté de fusion et de stase d’une part et expansion de la vie intérieure, ouverture à la sensualité du corps et des mots d’autre part.