1985
Copyright PERSEE 2003-2023. Works reproduced on the PERSEE website are protected by the general rules of the Code of Intellectual Property. For strictly private, scientific or teaching purposes excluding all commercial use, reproduction and communication to the public of this document is permitted on condition that its origin and copyright are clearly mentionned.
Wojtek Zafanolli, « Chine : de la transition socialiste à la transition capitaliste ? », Revue d'études comparatives Est-Ouest, ID : 10.3406/receo.1985.2579
A l'heure où l'on s'interroge à nouveau sur la « voie » chinoise, l'article est une tentative de synthèse de l'évolution économique de la Chine depuis 1978. S'appuyant sur un bilan statistique sommaire, il met peu à peu en place les différents éléments de la dialectique qui oppose le système bureaucratique et stalinien institué dans les années 1950 et la réforme entreprise depuis 1978 sous les auspices de Den Xiaoping. Après beaucoup de tâtonnements, cette dernière s'est concrétisée dans l'ambitieux projet adopté au plenum d'octobre 1984. S'il est appliqué, ce projet entraînerait la dénationalisation de fait de pans entiers de l'économie chinoise, qui cesserait d'être une économie de commande et se transformerait en une économie semi-libérale. Partant, tout le problème est de déterminer pourquoi la logique de la réforme s'est finalement imposée à une direction politique qui, au début, envisageait seulement de lui abandonner des activités périphériques incontrôlables par le plan et de s'en servir comme appoint à celle d'un système assaini au moyen du « réajustement ». Loin d'être complémentaires, ces deux logiques se sont en fait très vite avérées incompatibles, et, en amplifiant les défauts structurels auxquels elle était censée porter remède, leur combinaison a été un facteur supplémentaire de la désorganisation économique. Ce résultat, inattendu, s'est traduit dans un premier temps par un gel de la réforme. Ce gel aurait pu lui être fatal, ou bien, il aurait pu être un premier pas vers sa dégradation progressive. Mais la campagne contre « la pollution spirituelle », à la fin 1983, a tout remis en question. Orchestrée par les conservateurs, cette campagne a persuadé les pragmatistes au Bureau politique de la précarité de la démaoïsation et de sa partie la plus intangible — parce que vitale —, la décollectivation des campagnes. Pour faire face à la menace, ils se livrèrent alors à une véritable escalade réformiste, qui devait culminer dans la « résolution » prise au 3e plenum du 12e congrès. Celle-ci prévoit un rétrécissement du plan impératif aux « sources » de la production industrielle et à leurs abords immédiats (l'industrie lourde) et l'abandon de tout le reste au marché. Simultanément, toute une catégorie d'entreprises devra être contractualisée — et peut-être même vendue — à des particuliers. Dans la dernière partie sont évaluées les chances de cette nouvelle répartition plan/marché de parvenir à supplanter le système et à s'articuler efficacement sur le noyau dur qui en serait conservé. Puisque c'est du système que, dans un contexte politique inchangé, dépendra la mise en œuvre effective de la réforme, celle-ci devra compter sur les aléas de la bureaucratie, et peut-être apprendre à composer avec elle.