Ozu, le siècle et le geste

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4 novembre 2011

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Résumé 0

Pour des raisons qui nous semblent évidentes, l’histoire comprendra sans aucun doute le xxe siècle comme l’âge de la grande catastrophe de l’humanité. Catastrophe qui porte non pas seulement sur la déchéance des grands récits politiques, mais aussi sur l’émergence de la technique comme agent du pouvoir. Le dispositif où la technique se montre elle-même dans toute sa puissance, comme machine politique, est l’image reproductible : la photographie a accompagné la Grande Guerre, comme le cinéma la Deuxième, et la télévision les guerres du Golfe. Souvent, moins pour témoigner des massacres que pour participer à la construction même de l’événement (ainsi la montée en puissance du fascisme et du stalinisme, mais aussi du « monde libre » contre ses ennemis). Depuis le xxe siècle, il n’y a plus de politique sans image et sans son corrélat : le montage. Il n’y aurait, donc, plus de démarches politiques tout court, mais des agencements technologico-politiques dont la forme d’apparition et d’archivage est le montage. Si bien qu’il est possible de dire que la politique se présente comme la continuation du montage par d’autres moyens. Sans doute, le temps est arrivé pour esquisser une archive du présent à partir de notre proche passé, le xxe siècle. Non pas seulement pour des évidentes raisons chronologiques, mais pour des motifs qui concernent le changement du statut technique du temps lui-même, dans la mesure où la forme ou, mieux dit, la modulation de l’archive a changé ces dernières années. Du coup, chacun peut depuis son fauteuil, grâce aux dispositifs tels que youtube et dailymotion se rapporter à presque toutes les séquences du siècle : des films de Méliès, en passant par Chaplin et Fernandel, aux images de la libération de Paris, de la guerre du Vietnam, des vidéos de Michael Jackson et des derniers moments de Ceausescu. Le musée imaginaire de Malraux portait dans ses photographies l’impossibilité de réunir toutes ses œuvres. L’archive de nos jours ne porte plus sur l’absence réelle des œuvres, mais sur la disparition effective de tout événement, de toute présence, par le biais d’un montage généralisé. Disparition qui n’a rien d’imaginaire. Car le montage efface la trace propre à l’inscription de l’archive scripturale au profit d’un enchaînement de mouvements ou de durées où l’archive se trouve ébranlée. L’objectif de ce texte est de contribuer à esquisser le point où l’humanité, par ses mêmes moyens techniques, renverse en quelque sorte le sens de cet effacement : ce ne serait comme trace, mais comme geste qu’une pensée technologico-politique de l’archive pourrait restituer une certaine justice à l’humanité du xxe siècle. D’où l’importance des films d’Ozu, qui a inventé, malgré son siècle, une autre souveraineté du mouvement, du temps, du corps de l’homme et de la femme ordinaires.

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