Ethnographie, ethnologie et africanisme. La « disciplinarisation » de l’ethnologie française dans le premier tiers du xxe siècle

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26 juin 2020

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Emmanuelle Sibeud, « Ethnographie, ethnologie et africanisme. La « disciplinarisation » de l’ethnologie française dans le premier tiers du xxe siècle », Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, ID : 10.4000/books.editionsehess.20156


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C’est seulement avec la création de l’Institut d’ethnologie de la Sorbonne en 1925 que l’ethnologie devient une discipline d’enseignement en France. On voudrait montrer dans cette contribution que sa « disciplinarisation » commence plus tôt, dès les premières années du xxe siècle, et qu’elle repose sur un ensemble de négociations, parfois d’affrontements transitoires ou plus durables, entre des réseaux hétérogènes de chercheurs dont les pratiques sont à la fois complémentaires et antagonistes. Elle répond aussi aux fortes sollicitations du contexte, en particulier aux demandes d’expertise formulées par les autorités coloniales. À l’opposition manichéenne entre des « amateurs coloniaux » enfermés dans des enquêtes utilitaires in situ et des « savants métropolitains » exerçant leur magistère critique depuis la Sorbonne, elle invite à substituer l’étude d’une convergence qui se fait difficilement parce qu’elle doit solder les conflits antérieurs de la science de l’homme, parce qu’elle implique l’intégration dans des réseaux académiques très étroits des nouveaux venus que sont les administrateurs des colonies érudits, mais aussi parce qu’elle pose au moins deux questions épistémologiques essentielles : comment partager l’expérience subjective de l’enquête ethnographique de terrain, et comment concilier cet enracinement local des savoirs et l’universalisme des méthodes qui les construisent ? Ainsi, la disciplinarisation de l’ethnologie ne se résume pas à un avènement théorique ou méthodologique qui viendrait éclairer et organiser des connaissances factuelles éparses. Elle participe de façon critique à la construction en cours des aires culturelles en offrant à la fois un contrepoint d’inspiration universaliste et un point d’ancrage de plus à leur pluridisciplinarité. Elle est également prise dans les tensions suscitées par les passages à la pratique suggérés par la domination coloniale et par la volonté de limiter ses abus.

It is only with the creation of the Institute of ethnology at the Sorbonne in 1925 that ethnology began to be taught in France. This article attempts to show that its « disciplinarisation » began earlier, since the first years of the 20th century and that it was based on a set of negotiations, sometimes transitory or more enduring confrontations between heterogeneous networks of researchers whose practices were at one and the same time complementary and antagonist. It was also a response to the strong demands of context, in particular to demands of expertise formulated by the colonial authorities. Contrary to the manichean opposition between the « colonial amateurs » enclosed in utilitarian inquiries in situ and « metropolitan scholars » exercising their critical authority from the Sorbonne, it suggests the study of a convergence, which takes place with difficulty because it has to wield conflicts preceding the human sciences. Indeed, it implies the integration of the new arrivals who are erudite administrators of colonies into very close academic networks, but also raises at least two essential epistemological questions : how to share the subjective experience of the ethnographic field work and how to reconcile the local roots of this knowledge and the universalism of methods that construct them ? Thus, the disciplinarisation of ethnology is not limited to a theoretical or methodological happening that would enlighten and organize a scattered factual knowledge. At the same time it participates critically in the ongoing construction of cultural areas by offering a counterpoint of universalistic inspiration and a further point of anchorage to their pluridisciplinarity. It is equally subjected to the tensions created by the shift to the practice suggested by colonial domination and by the will to limit its abuses.

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