Identités musulmanes, orientalisme, ethnographie

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16 mars 2022

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Marc Gaborieau, « Identités musulmanes, orientalisme, ethnographie », Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, ID : 10.4000/books.editionsehess.24062


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Depuis 1970 les travaux de Bernard Cohn et d’Edward Said ont créé une mode : dénoncer les « représentations » coloniales de la société indienne comme des « créations » de l’imagination occidentale motivée par sa soif de domination. Cette mise en question a certes eu le mérite de mettre en garde contre les utilisations non critiques des sources coloniales. Mais elle risque de fausser et de stériliser la recherche en rompant la continuité historique entre la dure réalité coloniale et post-coloniale d’un côté, et, de l’autre, la période précoloniale reconstruite sur le mode mythique comme un âge d’or vierge de conflits et où les identités étaient fluctuantes. Cet article vise à restaurer la continuité à travers l’exemple de la description des identités musulmanes par les orientalistes et les ethnographes coloniaux. Il retrace d’abord la découverte de l’islam indien depuis les premières études juridiques de la fin du xviiie siècle jusqu’aux dernières synthèses du recensement de 1931. La question de la validité de ces sources est ensuite posée : un examen du droit précolonial et des exemples attestés d’affrontements intercommunautaires montre que le clivage de la société indienne sur des bases religieuses pré-existait à la colonisation ; l’étude de la stratification sociale prouve que la division de la société musulmane en ethnies et en « castes » est antérieure aux recensement coloniaux. Une troisième partie sur le bon usage des auteurs coloniaux montre qu’ils ont rassemblé une documentation indispensable, même et surtout pour ses critiques qui ignorent souvent les langues orientales ; il convient seulement de l’utiliser de façon historique, en évitant de porter ses descriptions à l’absolu comme des vérités primordiales ; on peut restaurer ainsi la continuité de l’histoire indienne où les identités se constituent et se modifient sur la longue durée.

Muslim identities, Orientalism and Ethnography: Should colonial authors be Rehabilitated?Since 1970 Bernard Cohn and Edward Said have launched a fashion: denouncing colonial ‘representations’ of the Indian society as ‘creations’ of Western imagination motivated by its thirst for domination. This denunciation proved indeed useful in cautioning against uncritical use of colonial sources; but in the long run it may alter and sterilise research by creating a historical discontinuity between, on the one hand, the hard reality of the colonial and post-colonial periods and, on the other hand, the precolonial era reconstructed in a mythical process as à golden age without conflicts and when identities were fluctuating. The aim of the present paper is to restore continuity between the precolonial and colonial periods through the example of Muslim identities as studied by orientalists and colonial ethnographers. The story of the discovery of Indian Islam is first told from the first juridical studies at the end of the 18th century down to the last synthesis of the 1931 Census. The validity of these sources is then questioned: an examination of precolonial law and of cases of communal confrontation shows that the cleavage of Indian society on the basis of religion was extent before colonization; a study of social stratification shows that Muslim society was divided into ethnic groups and ‘castes’ before the colonial censuses. The third part of the present paper, on ‘how to make good use of colonial authors’, stresses that the latter have gathered documents which are essential even and mainly for their critics who most often are not proficient in oriental languages; care should only be taken to have a historical approach to these sources and keep from considering their descriptions as eternal truths; one should be able, in this way, to restore the continuity of Indian history in which identities are created and modified in the ‘longue durée’.

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