7 octobre 2021
https://www.openedition.org/12554 , info:eu-repo/semantics/openAccess
Sarah Rey, « Les mains du prince », Publications de l’École française de Rome, ID : 10.4000/books.efr.20425
Dans le droit romain, la manus indique la puissance accordée au père et au chef de famille. Elle exprime l’idée de force et de possession. La main fait partie du vocabulaire juridique et donc mental des Romains ; c’est peut-être la raison pour laquelle les historiens et les biographes se montrent très attentifs aux mains des empereurs. Ces dernières semblent posséder leur autonomie et révéler des tempéraments. Tantôt métonymie du bon gouvernement, tantôt miroir de la tyrannie, les mains laissent deviner la teneur d’une politique. Les mauvais princes abusent de leur force, se perdent en gesticulations, s’abandonnent à toutes les formes d’adulation et de mollesse : leurs mains en témoignent. Les bons princes, quant à eux, comprennent les enjeux de la « chironomie », cette loi de la main énoncée par Quintilien : ils disciplinent leur main et la rendent secourable. Pour renforcer cette démarcation, les dieux se servent des mains comme messagères à travers les prodiges, les rêves, les statues et les sacrifices. Les empereurs et leurs mains se retrouvent alors au contact de la divinité, pour le meilleur et pour le pire.