26 novembre 2018
https://www.openedition.org/12554 , info:eu-repo/semantics/openAccess
Florence De Caigny, « « Divertir les yeux » ou « importuner les oreilles » ? », Presses universitaires de Rouen et du Havre, ID : 10.4000/books.purh.10398
Perçue comme un élément exogène, la narration divise les théoriciens au moment de la querelle sur les règles en 1628-1634. Contraire à l’essence même du théâtre pour les irréguliers, elle suppose un emploi mesuré pour les réguliers. Rappelant, dans ses Discours et préfaces, la nécessaire présence de la narration en raison des règles, Corneille la juge moins efficace que le spectacle et souligne la gêne qu’elle peut procurer au spectateur par les efforts de mémoire qu’elle réclame. Assez vague dans les conseils prodigués, il ne propose donc pas une « dramaturgie » de la narration et sa réponse est essentiellement pratique. Dans ses tragédies entre 1634 et 1660, Corneille a cherché à insérer le récit d’exposition dans l’action grâce au choix soigné des personnages, à une subtile superposition des types de discours rhétoriques (épidictique, judiciaire et délibératif) et à la création de conditions d’écoute propices. Enfin, la concentration ou la dilution de cette narration dans le premier acte contribue à mettre en scène le verbe et à divertir le spectateur sans « importuner » ses oreilles.