13 juin 2022
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Richard Tholoniat, « Le Carnet de campagne du colonel de Villebois-Mareuil : journal de bord d’un « volontaire » d’extrême-droite troublé », Revue LISA / LISA e-journal, ID : 10.4000/lisa.14110
Dans les récits concernant la deuxième guerre sud-africaine, ou « guerre des Boers », (1899-1902), le colonel (et comte) de Villebois-Mareuil (1847-1900) est présenté comme l’officier le plus célèbre de la centaine de volontaires français partis se battre aux côtés des Boers contre les Britanniques. L’anglophobie de ce militaire, l’un des fondateurs de l’Action française, relève bien du nationalisme de l’extrême-droite fin de siècle : après la défaite de 1870 qui entraîne la perte de l’Alsace-Lorraine et l’avènement de l’Empire allemand, la France va se heurter aux Britanniques dans ses visées coloniales à l’heure où s’effectue le partage de l’Afrique. De plus, l’humiliation de la France accusée d’injustice aux yeux du monde par l’affaire Dreyfus ravive les accusations de complot judéo-anglo-saxon. En France, la droite nationaliste et l’extrême-droite prennent le parti des Boers afin de vivre par procuration une vengeance contre l’ennemi héréditaire depuis la guerre de Cent Ans jusqu’à Waterloo et Fachoda afin de raviver un nationalisme malmené dans la dernière décennie du xixe siècle. Après sa mort à Boshof (Afrique du Sud), Villebois-Mareuil est présenté par une majorité de Français comme un héros, honoré par une cérémonie à Notre-Dame, des monuments, des noms de rues, des représentations iconographiques et des ouvrages et articles à sa mémoire. Cependant la lecture du Carnet de Campagne (1902) révèle une surprenante remise en question des certitudes du militant et, par là même, incite à l’examen du « combat douteux » des idéologies et des hommes en Afrique du Sud… et en France tandis que les traces de sa mémorialisation interrogent à l’heure de la culture de la protestation (« cancel culture »).