22 décembre 2015
Ce document est lié à :
info:eu-repo/semantics/reference/issn/0765-4944
Ce document est lié à :
info:eu-repo/semantics/reference/issn/2111-5044
https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/ , info:eu-repo/semantics/openAccess
Jean-Marc Sarale, « Argumentations sur les énergies renouvelables en France et au Japon », Cahiers de praxématique, ID : 10.4000/praxematique.3832
Ce travail se veut une tentative d’argumentation comparée, au sens de Plantin 2005, portant sur la relation, par la presse écrite, de débats relatifs à l’implantation d’éoliennes. Après de brèves considérations sur les objectifs et la méthodologie d’une telle argumentation comparée, il présente deux projets de développement éolien, l’un en France, l’autre au Japon, qui ont donné lieu, dans chacun des deux pays, à des controverses nourries, s’étendant sur plusieurs années. Puis il expose la constitution de deux corpus de presse, centrés sur la représentation de ces controverses et des argumentations en présence. La section suivante offre un panorama des principaux arguments invoqués pour ou contre les éoliennes, avant de proposer quelques critères de comparaison : le titrage des articles, l’orientation et la force illocutoire des conclusions soutenues, la fréquence des réfutations d’une position adverse. Une analyse sémantique et textuelle révèle que :- les péritextes sont plus ouvertement argumentatifs dans la presse japonaise, alors qu’ils paraissent davantage viser, du côté français, la mise en spectacle de la controverse ;- l’opposition aux éoliennes reste volontiers indirecte du côté japonais, mais elle est directe et parfois virulente dans la presse française ;- la réfutation d’une argumentation adverse est beaucoup plus fréquente dans le corpus français que dans le japonais. La dernière section compare la distribution des types d’arguments selon leur mode d’inférence. Les arguments de conséquence et de causalité dominent, de manière écrasante dans le corpus japonais (74 %), de façon moins marquée, quoique majoritaire, en français (54 %). L’inférence basée sur des conséquences négatives l’emporte sur les conséquences positives, mais les marqueurs linguistiques sur lesquels elle repose sont moins variés dans le corpus japonais que dans la presse française ; ils y sont davantage lexicaux que syntaxiques – cf. l’usage fréquent du nom eikyô, signifiant influence (mauvaise). L’usage de l’argument de conséquence semble donc fondé, dans le discours japonais, sur un patron inférentiel fort et rigide à la fois. Quant aux autres types d’arguments, la comparaison révèle une plus grande diversité dans le corpus français, où par ex. les arguments par analogie ou par exemple ne sont pas rares (12 %), alors qu’ils sont quasi absents du corpus japonais, les locuteurs semblant les éviter, comme s’ils étaient jugés inappropriés. Cette étude conduit à quelques conclusions, dont les suivantes : l’usage des arguments paraît plus rhétorique du côté français, plus pragmatique du côté japonais ; et la construction de la controverse s’avère plus polémique dans la presse française, tandis que la presse japonaise préfère représenter des affrontements indirects et insiste souvent sur la référence aux fondements, légaux ou statistiques, des inférences argumentatives.