2010
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TTR : Traduction, terminologie, rédaction ; vol. 23 no. 1 (2010)
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Ryan Fraser, « What’s Up, Tiger Lily? On Woody Allen and the Screen Translator’s Trojan Horse », TTR: Traduction, terminologie, rédaction, ID : 10.7202/044927ar
Ce n’est pas en tant qu’acteur, mais grâce à l’adaptation de dialogues et au doublage de films que Woody Allen est parvenu à passer du monde de la stand-up comedy à celui du cinéma. En 1966, il transforme un film d’espionnage japonais en comédie américaine en supprimant le dialogue original et la bande son du film puis en inventant un nouveau dialogue de son cru à partir des images du film. Le résultat fut Lily la tigresse (1966), un film où Allen force un groupe de personnages japonais à suivre, sans le savoir, un scénario par leurs gestes tout en prononçant des paroles correspondant à un autre scénario. Le film ouvre un champ de réflexion théorique sur la traduction audio-visuelle en tant que mode d’appropriation (ou d’aliénation) interculturelle. En premier lieu, Lily la tigresse remet en question le statut de l’auteur au cinéma. Allen fait de la « réécriture » un alibi contre des accusateurs potentiels qui pourraient réagir contre l’étrange distorsion de la relation son-image, et contre l’usage hautement stéréotypé de la culture asiatique. En deuxième lieu, le film offre une nouvelle perspective sur l’antagonisme entre la voix et l’image, qui est le propre de tout film doublé en langue étrangère. L’examen du film de Woody Allen offre à la théorie le moyen de dépasser le mépris que le discours universitaire réserve souvent au doublage, mettant celui-ci au service de la parodie interculturelle. Le dernier ouvrage de Michael Cronin (2009) sur la mondialisation et Hollywood fournit des concepts clés pour mener l’analyse du film.