2005
Ce document est lié à :
Rabaska : Revue d'ethnologie de l'Amérique française ; vol. 3 (2005)
Tous droits réservés © Société québécoise d’ethnologie, 2005
Claude Verreault, « Voyage en Acadie et autres pérégrinations nord-américaines de Geneviève Massignon : l’Amérique française vue par une « Française de France » au milieu du XXe siècle », Rabaska: Revue d'ethnologie de l'Amérique française, ID : 10.7202/201710ar
Née à Paris le 21 avril 1921, Geneviève Massignon est décédée prématurément le 9 juin 1966, à l’âge de 45 ans. Fille de l’islamologue Louis Massignon, filleule de l’écrivain Paul Claudel, elle a grandi dans un milieu d’intellectuels. Après avoir obtenu une licence ès lettres classiques à la Sorbonne, elle suivra après la guerre les conférences d’Albert Dauzat à l’École des Hautes Études, alors que ce dernier s’apprêtait à lancer le chantier du nouvel atlas linguistique de la France par régions. Intéressée à la fois par la linguistique et le folklore, elle est fascinée par l’Acadie, dont elle avait entendu parler par le violoniste Arthur Leblanc, une connaissance de la famille, ainsi que par son frère Yves Massignon qui avait commencé une étude de géographie humaine sur la haute vallée du fleuve Saint-Jean, cours d’eau qui marque la frontière entre le Nouveau-Brunswick, le Québec et l’État américain du Maine. Grâce à une bourse du ministère français des Affaires étrangères, Geneviève Massignon séjournera en Acadie en 1946-1947 pour y effectuer des enquêtes linguistiques et folkloriques qui donneront lieu à deux thèses de doctorat soutenues à l’Université de Paris. Intitulée Les Parlers français d’Acadie et publiée en 1962, sa thèse principale constitue une étude remarquable à tous égards, pour laquelle Massignon a d’ailleurs obtenu la Médaille de l’Académie canadienne-française en 1963. Consacrée à la chanson populaire, sa thèse complémentaire ne sera publiée qu’en 1994. De retour en France en 1947, Geneviève Massignon se consacrera à la préparation et à réalisation de l’Atlas linguistique et ethnographique de l’Ouest. À l’occasion de son séjour en Acadie en 1946-1947, Geneviève Massignon en a profité pour traverser le Canada d’est en ouest puis pour se rendre en Louisiane, ce qui lui a permis de se faire une meilleure idée de ce que l’on appelle maintenant la francophonie nord-américaine. À partir des impressions qu’elle a rapportées de son voyage en Acadie et de ses autres pérégrinations nord-américaines, je me propose, dans cet article, de dégager la vision que cette « Française de France », comme elle s’est elle-même qualifiée, a eue de l’Amérique française de l’époque.