27 mars 2014
info:eu-repo/semantics/OpenAccess
Hélène Chaubin, « Étrangers ou agents de l'étranger ? », HAL-SHS : histoire, ID : 10670/1.0j9oys
À partir de 1947 qui marque le début de la Guerre froide, certains exilés politiques en France sont considérés par les Services de Renseignement comme de potentiels « ennemis de l’intérieur », des espions ou des agents de subversion. Avec la création du Kominform, ce sont les communistes étrangers qui sont vus comme les plus dangereux. En raison de leur nombre et de la situation politique de leur pays d’origine, Polonais et Espagnols font l’objet d’une surveillance particulière. C’est par exemple le cas des Polonais dans la Lorraine industrielle et des Espagnols dans le grand Sud-Ouest, en périphérie des Pyrénées. La communauté polonaise est fragilisée dans ses structures de sociabilité par la scission syndicale de 1947 et la politique de Varsovie qui est en rupture avec l’Occident et qui veut le rapatriement massif des exilés. Quant à la diaspora espagnole, elle se divise de plus en plus avec le rapprochement entre l’ouest européen et l’Espagne franquiste. La France craint Moscou plus que Madrid. Les « Rouges » espagnols sont isolés, frappés à partir de 1950 par une répression policière qui détruit leurs organisations, désormais interdites, et exclut des centaines d’entre eux, expulsés ou déportés. Même un passé de résistant n’est plus une protection. Dans la décennie suivante, l’immigration polonaise se tarit et les projets anti-franquistes sont en échec. Une nouvelle génération d’immigrés espagnols ne les assume plus. La Guerre froide continue, mais les exilés politiques ne sont plus considérés comme un danger majeur. Ce phénomène important, qui a constitué l’un des premiers impacts de la Guerre froide en France, s’est donc inscrit dans sa phase initiale.