2022
Cairn
Matthieu Béra, « Crime et religion chez Durkheim : Les liens forts entre ses sociologies criminelle et religieuse », Études Durkheimiennes, ID : 10670/1.26xuxe
Il existe un lien chronologique entre les cours de criminologie de Durkheim sur le crime et la peine en 1892–1894 et son premier cours de sociologie religieuse, dit de la révélation (1894–1895), qui se succèdent sans transition. Les deux domaines s’inscrivent d’ailleurs dans les cycles de ‘Physique générale du droit et des mœurs.’ Au-delà de ce constat, cet article met l’accent sur six points qui relient intellectuellement les deux domaines d’études, toujours analysés séparément par les commentateurs de son œuvre. Le crime est en soi un moyen de révéler la solidarité sociale et la religion qui la porte. En outre, la pénalité est le lieu d’articulation entre le droit pénal et la religion. Quant aux les ‘lois de l’évolution pénale’, elles manifestent l’élimination progressive de la substance religieuse des droits criminels modernes. Durkheim esquisse dans sa sociologie criminelle une théorie du sacré en réfléchissant au respect et à l’autorité de la loi, qui est transcendante. On évoque également les digressions suggestives dans lesquelles il rattache les tatouages des criminels à l’institution du totémisme. Enfin, on montre que sa typologie des crimes est l’occasion de transformer la religion en ‘variable explicative’, plutôt qu’en ‘variable à expliquer’, ce qui ne manque pas de lui conférer une objectivité scientifique considérable.