14 avril 2016
Fabien Tarrit, « Marxisme et théorie de l’équilibre. A propos de la reconstruction de John Roemer », HAL-SHS : économie et finance, ID : 10670/1.33hwyz
Peut-on reconstruire sans la trahir la pensée de Marx à partir de la théorie néoclassique de l’équilibre ? C’est la question à laquelle a tenté de répondre John Roemer. Aux côtés notamment de G.A. Cohen et de Jon Elster, il fut l’un des principaux contributeurs du marxisme analytique, principalement au cours des années 1980. Son apport à ces échanges a essentiellement porté sur la théorie économique, et il est un acteur central du « marxisme néoclassique » ou « marxisme de choix rationnel ». Selon lui les outils de Marx, vieux de plus d’un siècle, ne sont plus adaptés à la science sociale contemporaine, et la théorie de Marx, en particulier ses fondements économiques, doit rompre avec l’idée qu’elle détient une spécificité méthodologique. Son objectif est alors de parvenir à des conclusions proches de celles de Marx en utilisant des outils méthodologiques différents, en particulier la démarche hypothético-déductive. Son programme de recherche se fonde sur la théorie néoclassique de l’équilibre et vise à établir la possibilité pour la théorie économique marxiste de reposer sur des fondements microéconomiques. Nous verrons comment, après avoir déconstruit la théorie marxienne de la valeur, après avoir réfute la loi de la baisse tendancielle du taux de profit, il tâche de reconstruire la théorie marxienne de l’exploitation sur la base de la théorie des jeux, de comportements optimisateurs et de la théorie de l’équilibre. Nous discuterons la cohérence et la pertinence de cette approche, en remarquant notamment que les résultats auxquels parvient Roemer mettent en difficulté l’hypothèse d’unité théorique de l’appareil marxien, et nous nous demanderons si ce qui est remis en cause est la théorie de Marx ou la possibilité de l’associer aux outils de la théorie de l’équilibre.