2003
Cairn
Jean Dagen, « Fontenelle et l'épicurisme », Revue d'histoire littéraire de la France, ID : 10670/1.4n0ocs
Il peut être utile de préciser les rapports que Fontenelle entretint avec la littérature épicurienne, l’ancienne et la contemporaine. Influence de Gassendi et permanence du courant néo-épicurien, rencontre de Bernier, publications attestant autour de 1680 un intérêt renforcé pour Épicure : autant de raisons d’interroger les textes du « géomètre ». Des rapprochements peu contestables, prouvant la lecture de l’Abrégé de la philosophie de Gassendi, décèlent certaine parenté de pensées également incompatibles avec une métaphysique spiritualiste, sans pourtant faire de Fontenelle un épicurien mieux avéré que ne le fut un Lucien. Sa philosophie morale notamment paraît s’inspirer moins d’un strict épicurisme que de ce que s’en approprièrent Montaigne et Saint-Évremond.Mais surtout, à considérer l’exigence logique qu’il met en œuvre, et jusque dans les Nouveaux dialogues des morts et le discours Sur le bonheur, à y reconnaître, comme il est nécessaire, un dessein philosophique fondateur et cohérent, il faut admettre que le principe de rationalité formelle (ou méthodique) qu’il revendique est directement hérité, les textes en témoignent, d’une révolution cartésienne ramenée à l’essentiel. En fait d’épicurisme, Fontenelle retient ce que Descartes même n’en renie pas et de plus, dirait-on, ce qui sert à épurer de ses vicieux développements le modèle cartésien du bien raisonner. Mais cela même le doit-il aux épicuriens ? ou à eux seuls ?