2004
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Jean Luc Collart et al., « Vermand, Saint-Quentin et Noyon : le chef-lieu d'une cité à l'épreuve de la christianisation », Supplément à la Revue archéologique du centre de la France, ID : 10670/1.50awck
La localisation du chef-lieu des Viromandui et du premier siège épiscopal du Vermandois a été l'objet d'un vif débat depuis le XIIIe s. Deux agglomérations gallo-romaines voisines de 11 km peuvent revendiquer ces titres : Saint-Quentin et Vermand. Ptolémée signale que le chef-lieu de la cité s'appelle Augusta. Plusieurs indices permettent de le placer à Saint-Quentin, en particulier le nom d'un quartier de la ville médiévale, "Aouste". D'un autre côté, le nom de Vermand vient de Vermandis, toponyme caractéristique qui semble désigner le chef-lieu des Viromandui, au moins pour le Bas-Empire. Depuis la fin du XIXe s., cette apparente contradiction a été résolue par l'hypothèse d'un transfert de la caput civitatis de Augusta-Saint-Quentin à Virmandis-Vermand, au tournant des IIP-IV6 s. Les découvertes archéologiques de ces dernières décennies confirment cette idée. Tout d'abord, elles permettent de localiser sans hésitation la ville principale du Haut-Empire à Saint-Quentin. D'autre part, la quasi-absence d'indices archéologiques à Saint-Quentin à partir du dernier quart du IIIe s. et leur abondance pour le IVe s. à Vermand, plaident pour la promotion de cette agglomération secondaire comme chef-lieu de la cité au Bas-Empire. Une partie des historiens qui ont admis ce transfert ont pensé que Awgi/sta-Saint-Quentin a recouvré sa prééminence régionale dès l'époque mérovingienne et que le siège épiscopal a été transféré au VIe s. à Noyon depuis cette ville. Il nous semble plutôt que Vermand est resté le centre du Vermandois au moins jusqu'au VIIIe s. Ainsi, aux VIe- VIIe s., les évêques de Noyon portent encore le titre d'évêque du Vermandois. Mais surtout, la Vita Eligii et la Passio et Inventio s. Quintini, rédigées au plus tôt dans la seconde moitié du VIIe s., présentent Vermand comme la ville principale : dans la vie de l'évêque Éloi, la sépulture du martyr Quentin (qui se trouve à Saint-Quentin) est située par rapport à Vermand : haud procul ab urbe Vermandense ; plus explicite encore, l'Inventio s. Quintini (récit de la découverte du corps de Quentin) indique que l'on veut porter les restes du martyr à Vermand, qualifiée de civitas, et justifie leur présence à Augusta par un miracle. À partir du IXe s., les sources écrites s'intéressent uniquement à Saint-Quentin. À partir de la deuxième Inventio par Éloi, au milieu du VIIe s., le tombeau de Quentin fait l'objet d'un pèlerinage important qui favorise le développement du monastère Saint-Quentin. Ce monastère donne naissance à un bourg, fortifié à la fin du IXe s. qui devient la ville principale du Vermandois, désormais appelée Saint-Quentin.