Les récits de l’incertitude planétaire. Discordance ou pluralisme ?

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22 octobre 2020

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Karoline Postel Vinay, « Les récits de l’incertitude planétaire. Discordance ou pluralisme ? », Archive ouverte de Sciences Po (SPIRE), ID : 10670/1.51txv3


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La crise sanitaire constitue un « moment mondial » par son irruption simultanée et sa visibilité dansl’ensemble des nations. Cependant sa réalité pathologique, et ses effets socio-économiques varientconsidérablement à l’échelle du monde et à celle des sociétés. Par ailleurs les réponses nationales etinternationales à la pandémie ont accentué les contradictions de l’hyper-connectivité mondiale(intégration renforcée vs. accroissement des inégalités et des effets d’exclusion), exacerbant un étatglobal d’incertitude que Michael Spence qualifiait il y a déjà plus d’un an d’ « incertitude radicale »(radical uncertainty). Les incertitudes scientifiques liées à la nature du virus et de l’épidémie n’enconstituent qu’une partie. La notion même d’ « incertitude » est un objet bien identifié par les sciencessociales, mais a peu mobilisé les relations internationales (RI), sauf en association avec la sociologiedu risque (U. Beck) ou de manière fugitive dans les approches critiques de la sécurité. L’omniprésence de l’incertitude dans le déroulement de la pandémie apporte un nouvel éclairage au rôle des récits géopolitiques, et en l’occurrence aux multiples mises en récit de ce « moment mondial ». Depuis quelques années l’analyse diplomatique évoque une « bataille des narratifs », ou « narrative wars » pour décrire une forme de rapport de force de plus en plus manifeste dans l’élaboration des agendas internationaux. J’ai pour ma part utilisé l’expression « récits et contre-récits géopolitiques » autour du 11 Septembre 2001. La capacité d’élaborer et d’imposer un récit géopolitique devient un attribut de la puissance, comme en attestent la volonté explicite de la Chine de se doter d’un « pouvoir narratif » (littéralement « un pouvoir de la parole » huayuquan), ou à l’inverse la carence narrative chronique de l’Union Européenne. Aujourd’hui cet enjeu de puissance entre en résonance avec la nécessité d’ajuster la gouvernance internationale à un nouveau degré d’incertitude, qui constitue entre autres un défi narratif. En témoigne la concurrence narrative accrue, multiforme, et aussi assumée, à l’instar de Josep Borrell début mai 2020, qu’on observe depuis la déclaration officielle de pandémie par l’OMS. Or si cette concurrence est incontestablement à fois l’effet et la cause d’une coopération dégradée, on ne doit pas perdre de vue qu’elle est aussi le reflet d’une pluralité de fait de la scène internationale. C’est précisément parce qu’une forme de coopération internationale doit être maintenue dans cette période d’incertitude radicale qu’il peut être utile de ne pas limiter l’analyse des récits à celle d’un simple rapport de pouvoir. L’intérêt d’une approche narrative des relations internationales, et plus spécifiquement de l’ordre international, est aussi de montrer qu’une très grande diversité de récits, plus ou moins contradictoires, coexistent dans un même espace de décision. A un moment où, après le choc de la pandémie, les représentations du «monde d’après » tiennent plus de la prescription que de la prévision, la prise en compte de cette diversité semble plus que jamais nécessaire.

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