14 décembre 2021
Thibault Delfavero, « Pourquoi autant, pourquoi si peu ? Éléments de sociologie des violences dans le sport des amateurs. », HAL-SHS : sociologie, ID : 10670/1.7jh5hk
En France, 12000 matches de football amateur sont émaillés de violences chaque année. C'est plus que dans toutes autres pratiques sportives. Mais rapportés au nombre total de rencontres disputées chaque saison, les faits ne concernent que 19 matches pour 1000 joués. Alors pourquoi autant et, en même temps, pourquoi si peu ? À quoi tient la comptabilité de ces déviances sportives les plus dures ? Comment en vient-on à recourir à la violence dans le sport amateur ? Comment rendre compte sociologiquement de phénomènes a priori résiduels ? Fondée sur une démarche inductive et comparative - le cas du football amateur est comparé à ceux, moins touchés, du handball et du basket-ball -, cette recherche repose sur une chaîne d'enquêtes visant à faire varier les échelles d'observation. Pourquoi procéder de la sorte ? Parce que les faits sont difficilement accessibles à l'observation directe. Parce que le chercheur s'accommode mal des discours indigènes rapportés. Parce que la catégorie « violence » regroupe une diversité de conduites et de sanctions. Parce qu'intégrer l'hétérogénéité de l'action violente implique de composer avec l'irréductibilité des situations. Dans ces conditions, on s'interroge sur le caractère proprement sociologique des faits. Menées consécutivement, quatre séries d'investigations ont permis d'examiner le détail statistique des faits dans le but d'y repérer des (ir)régularités (1), d'apprécier le cadre normatif local d'apposition de la sanction disciplinaire (2), d'observer quelques-uns des contextes les plus concernés (le cas des catégories sportives précédant l'entrée en séniors) (3) et d'accéder aux discours de ceux qui ont été les auteurs de faits les plus lourdement sanctionnés (les contrevenants) (4). Nous montrerons que l'étiologie des passages à l'acte violent dans l'amateurisme est plurifactorielle : entre production institutionnelle des violences, contextes « incidentogènes », et individus pris dans des situations conflictuelles.