L'univers quantique de Marguerite Duras et la critique des dispositifs

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5 juin 2007

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Arnaud Rykner, « L'univers quantique de Marguerite Duras et la critique des dispositifs », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.7kacx0


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Résumé Fr

Parce qu'elle a très tôt nié l'évidence du réel, son caractère de preuve immuable et sa fixité, Duras a travaillé à une destruction systématique des coordonnées traditionnelles de l'œuvre, participant à une révolution sans précédent de la pensée. A la construction d'un univers unique, stable et cohérent, qui caractérisait plus ou moins la littérature antérieure, l'œuvre de Duras oppose un univers probabiliste, non-séparable et indiscernable – un univers proprement quantique. Au personnage clairement déterminé, « étiquetable », avec une identité fixe, unique et séparée, l'écrivain a ainsi préféré rapidement des entités troubles, indistinctes, superposables, comme les trois hypostases d'Aurélia Steiner, qui se présentent comme trois états d'une même enfance, à moins qu'il ne s'agisse de trois consciences qui se croisent, fusionnent, puis se séparent à nouveau sans que l'on puisse clairement distinguer quelle Aurélia parle dans ces voix qui avancent comme une succession d'ondes. Tout comme le quanton, à la fois partout et nulle part, toujours peut-être ici et / ou peut-être là-bas, et qui est avant tout une possibilité de réalité, tout en étant le cœur de la réalité, la fable durassienne n'est jamais qu'une histoire possible, juxtaposée à toutes les autres histoires possibles. Donnée non comme une réalité fixe et qui ne dépend de personne, mais comme une réalité qui demande à être actualisée par un observateur (à l'image du pêcheur de la parabole quantique des « poissons solubles »), elle se traduit notamment par la profusion des conditionnels, dont on sait l'importance depuis India Song. De même, à travers la réécriture des cycles et la circulation d'un support à l'autre (« textes-théâtres-films »), chaque version de l'œuvre n'est qu'une des positions possibles de cette dernière. Parce qu'elle sait que le réel n'est pas assignable et qu'il excède et les mots du texte, et l'espace du théâtre, et les images du film, elle a besoin de cette circulation permanente qui lui permet d'être au plus près de ce quantum poétique et métaphysique qu'elle étudie. Ce glissement continu des quanta, aussi bien psychiques que physiques, cette fluctuation perpétuelle sont tellement inhérents au réel que l'écriture durassienne ne peut, au bout du compte, que se définir par rapport à eux. Et elle le fait dans une proximité si grande - et si troublante - avec le discours scientifique contemporain que tout se passe comme si Duras s'avérait savoir sans les scientifiques (comme elle le fit, de la psychanalyse, sans Lacan), ce que la science la plus contemporaine nous apprend sur le réel .

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