30 mai 2016
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Pierre Bodu et al., « On a caché des lames de silex dans l’Icaunais ! Le gisement du Paléolithique supérieur de Chaumois « hameau des Bries » à Appoigny (Yonne, France). Approche préliminaire de l’industrie lithique provenant d’un amas », HAL-SHS : archéologie, ID : 10670/1.86q4yl
Les « caches » ou « dépôts » de lames de silex sont des ensembles archéologiques relativement mal connus pour l’ensemble du Paléolithique supérieur. Certes des exemples existent mais ils sont peu nombreux et en raison de leur mise au jour à l’occasion de fouilles anciennes, ils demeurent souvent peu informatifs. L’utilisation du terme cache est même parfois galvaudée alors que le contexte de la découverte est insuffisamment documenté et que les relations entre les lames sont ignorées. L’exhumation récente d’un dépôt de lames, sur une surface limitée d’un site de plein-air, sur la commune d’Appoigny (Yonne) au lieu-dit "Chaumois", vient utilement combler cette lacune documentaire. La précision des opérations menées dans un premier temps lors d’un diagnostic puis dans le cadre de fouilles préventives, a permis d’obtenir de riches informations spatiales, techniques mais aussi économiques et de proposer des interprétations sur la composition de cette concentration. L’amas composé de 340 fragments de silex taillés est avant tout caractérisé par une très forte proportion de lames alors que les éclats, lamelles et nucléus sont particulièrement rares. Il s’agit donc du résultat d’une sélection essentiellement composée de supports laminaires bruts et de quelques outils par ailleurs peu diagnostiques (burin, grattoir, lames utilisées). Un seul fragment de lamelle à dos accompagne cet outillage sur lames. Les caractéristiques techniques et morphologiques des supports et ce que l’on peut en déduire sur la chaîne opératoire permettent de proposer une attribution de cet ensemble au Magdalénien moyen ou final qui trouve peu d’écho dans les environs proches. L’analyse de l’ensemble montre un choix porté vers des lames appartenant à différentes séquences de la chaîne opératoire, lames de plein débitage, comme lames d’entretien. Ce choix, assez hétéroclite en termes de régularité et de morphologie des lames, pose la question de ce que les préhistoriques considéraient comme potentiellement utilisables et de ce que nous appelons les intentions des tailleurs. La réalisation de nombreux remontages montre que ces lames ont été apportées soit en fagot, regroupant des supports issus du même bloc débité, soit sous forme de produits isolés, sélectionnés au sein de débitages distincts. Les différentes qualités de matière première montrent que le débitage d’une trentaine de blocs, est à l’origine de ce regroupement de quelques 170 lames. Postérieurement à son dépôt, sans doute dans un contenant, ce paquet de lames a subi des altérations post-dépositionnelles qui se traduisent notamment par une dispersion de certains objets sur près de 2,50 m de distance et par la présence de nombreux stigmates sur les lames liés à la cryoturbation et au tassement des sédiments (esquillements des bords, fracturation d’une grande partie des supports laminaires, etc.). Malgré cela, le dépôt a conservé son homogénéité et son étude permet d’obtenir des informations inédites sur une cache de lames du Paléolithique supérieur, qui plus est dans un contexte régional où les occupations préhistoriques sont rares.