2017
Cairn
Else Jongeneel, « Les deux modes picturaux des Allégories des cinq sens », Revue du Nord, ID : 10670/1.8mp42v
Les Allégories des cinq sens, une série de cinq panneaux exécutés en collaboration par Jean Brueghel l’Ancien et Rubens entre 1617 et 1619 étaient destinées au couple régent Albert d’Autriche et sa femme Isabelle d’Espagne, qui à l’époque exerçait la souveraineté sur les Pays-Bas espagnols. Les tableaux offrent un portrait idéalisé de la cour archiducale, de sa puissance dans le domaine politique et culturel, à travers la représentation d’une riche collection d’œuvres d’art, d’armes, d’objets scientifiques et de naturalia. Il s’agit de la première représentation d’une collection d’art privée dans l’histoire de la peinture occidentale. Les peintres se sont inspirés de deux genres picturaux, à savoir l’allégorie des cinq sens et le cabinet d’amateur. La représentation figurative de l’allégorie des cinq sens remonte au haut Moyen Âge. Le genre pictural du cabinet d’amateur, en revanche, est de date beaucoup plus récente. Développé à Anvers au début du xviie siècle, il reflète le prestige grandissant dont jouit la peinture dans une ville commerciale et artistique en plein développement. Le mélange de ces deux modalités picturales, la modalité emblématique et moralisante de l’allégorie sensorielle et la modalité intimiste et hédoniste du cabinet d’amateur, évoquent le vent nouveau qui souffle dans la peinture flamande vers la fin de la Renaissance et le rôle changeant de l’art dans la vie politique et citadine.