La gustothèque à l’épreuve du sociologue

Résumé Fr

Le champ de la gastronomie est omniprésent en France et se densifie, se diversifie, se complexifie depuis les années 2000 : les traditionnels chefs de cuisine des années 70, installés derrière leurs fourneaux et entourés de leur brigade, réactualisés par les chefs charismatiques stars de ces dernières années, sont aujourd’hui rejoints par les cheffes, les pâtissiers, mixologues, torréfacteurs, chocolatiers, baristas et autres penseurs en nourriture.Depuis Pierre Bourdieu et La distinction, nous savons que les goûts et les couleurs se discutent très largement, qu’ils sont affaires de socialisation, de classe sociale, de bonne volonté culturelle. Nous pouvons toutefois nous interroger sur les instigateurs de la démocratisation du goût à laquelle nous assistons depuis quelques années. De quelle(s) manière(s) ces artisans transforment-ils leurs savoirs et savoir-faire en émotions ? Depuis quand les consommateurs s’attendent-ils à vivre une « expérience » en dégustant un produit ? Comment cette popularisation transforme-t-elle les clients en amateurs éclairés, critiques, gastronomes, passionnés de cuisine ? Qu’est-ce qui différencie un chef élaborant autour d’un produit, d’un chef qui cherche à traduire une émotion, une idée ?C’est en travaillant le concept de gustothèque*, en examinant ses nature et fonctions, que ce travail de réflexion se donne pour objectif de comprendre comment les acteurs du goût reçoivent, entretiennent et transmettent leur culture, en quoi ils participent à la démocratisation du goût et à la définition de leur champ professionnel.* Terme emprunté à Philippe Conticini.