What role for scientific evidence in public health trials? The case of the Mediator Quel rôle pour les preuves scientifiques dans les procès de santé public ? L’exemple du Mediator En Fr

Résumé Fr

Le Mediator, médicament antidiabétique des laboratoires Servier, mis sur le marché en 1976, a été retiré de la vente en 2009, après que sa toxicité cardiaque a été établie par les résultats concomitants de trois études (une étude cas-témoins, un essai randomisé et une étude rétrospective de cohorte) et que l’agence du médicament l’a considérée disproportionnée au regard de son efficacité. S’en est suivi un énorme scandale, qui a débouché sur un procès pénal mettant en cause les laboratoires ainsi que l'agence du médicament pour avoir indument laissé de nombreuses années sur le marché un produit dangereux et ce faisant causé un grand nombre de décès et de blessures graves. Dans ce procès, les questions centrales sur lesquelles les juges doivent se prononcer ne portent pas tant sur l'évaluation de la toxicité du produit en cause, que sur la connaissance par les prévenus de cette toxicité (ou de la plausibilité de cette toxicité) à différents moments de l'élaboration et de la commercialisation du produit, ainsi que sur les décisions qu'ils auraient dû prendre (et n'ont pas prises). Dans ce cadre, les éléments de preuve relatifs aux effets délétères (qui correspondent aux grands types mentionnés dans les hiérarchies de l'EBM) deviennent des preuves pénales et sont utilisés en combinaison avec d'autres éléments de preuve, scientifiques ou non (documents internes, correspondances, documents commerciaux, etc.) pour essayer de statuer rétrospectivement sur des éléments intentionnels, relatifs à la connaissance ou non de la toxicité.Nous examinerons la manière dont ces différentes types de preuves scientifiques sont utilisés dans ce type bien particulier de décisions de santé publique que constituent les procès de santé publique et insisterons finalement sur l'extrême difficulté de la tâche épistémique que ces derniers demandent aux juges de mener à bien.