L’homme qui n’aimait pas le pouvoir : Jean‑Philippe Motte, un élu dans la ville

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2021

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Pierre Merle, « L’homme qui n’aimait pas le pouvoir : Jean‑Philippe Motte, un élu dans la ville », L'empreinte du temps, ID : 10670/1.dmxtu8


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Jean-Philippe Motte, élu local comme il en existe des milliers en France, s’est singularisé par sa façon vertueuse de faire de la politique. On s’attarde volontiers sur les défauts des «politiciens» – arrivistes, intéressés, mégalomanes, etc. Le cas de cet élu grenoblois prend à contre-pied les poncifs, faisant preuve d’une capacité à résoudre les contradictions et les impasses de l’engagement politique.À travers l’enquête minutieuse menée par Pierre Merle, jeune politiste urbaniste, on découvre comment un élu peut incarner le pouvoir local avec intelligence et humilité. L’auteur dessine le portrait d’un homme empreint de spiritualité et nourri de valeurs personnelles, et met en lumière les grandes lignes d’un engagement qui, comme pour de nombreux élus de l’ombre, raconte l’amour du bien commun et du jeu collectif. En retraçant l’histoire de cet homme attachant qui n’aimait pas le pouvoir, Pierre Merle ouvre une réflexion sensible sur les paradoxes du métier d’élu local et la question du pouvoir.—————————————AUTOUR DE L’OUVRAGEUn élu parmi les élusAlain FaurePierre Merle, jeune urbaniste dont j’ai eu la chance d’encadrer un brillant mémoire de fin d’étude à Sciences Po Grenoble il y a quelques années, a accepté de prendre la plume pour retracer l’engagement de Jean‑Philippe Motte en politique à partir d’un travail d’enquête mené à plusieurs. La fine équipe qui a réalisé cette introspection en rencontrant une quarantaine de témoins était composée, outre Pierre Merle, de Marie‑France Motte, Michelle Ciavatti, Juliette Brumelot, Michel Hollard et moi‑même. Marie‑France était son épouse dans la vie civile. Elle nous a accompagnés dans cette aventure avec tout son mordant au fil de rencontres piquantes et enjouées. Elle nous a brutalement quittés au début du mois de janvier 2021 alors que nous allions nous réunir une dernière fois pour boucler ce manuscrit. En clôture de la cérémonie d’adieu qui s’est tenue au Centre œcuménique Saint‑Marc, Juliette a fait la promesse en notre nom de mener jusqu’à son terme cette aventure éditoriale. Voilà qui est fait.Jean‑Philippe Motte a été un élu local comme il en existe des milliers en France, et en même temps, vous le découvrirez au fil des pages, il s’est singularisé par une façon particulièrement vertueuse de faire de la politique. J’ai eu l’envie de cette recherche collective sur l’intuition que cette grandeur d’âme et d’esprit méritait exploration parce qu’elle cachait des ressorts complexes sur les passions politiques et sur le goût du pouvoir. Tout le monde a salué l’homme, que ce soit dans sa démarche, ses combats ou ses prises de paroles en public. On disait volontiers que Jean‑Philippe était un cas à part. Mais curieusement, si on colle à l’histoire de ses années de conseiller municipal et métropolitain, l’empreinte relève surtout de sa capacité à incarner les contradictions et les impasses de l’engagement politique que vivent toutes celles et ceux qui prennent des responsabilités électives.Le constat est contre intuitif. On attend l’exemplarité des «politiciens» en opposition à une longue liste de défauts et de griefs concernant leur façon d’agir et de parler. Jean‑Philippe nous prend à contre‑pied en suggérant une humilité déroutante. Il ne revendique aucune solution ou recette, il n’affiche jamais ses valeurs, il questionne simplement, sans relâche, les fragilités, les violences et les impossibilités de la vie en collectivité et de la gestion de la cité. Sa foi, sa douceur, son intelligence critique, son extrême attention aux autres, son érudition, toutes ses qualités sensibles sont mises au service d’une pratique de la politique nourrie de doutes, d’empathie et de tolérance. Le chemin qu’il nous propose pour réparer le monde est furieusement inclusif et jamais il ne se traduit en termes de victoires ou de succès.Dans mes recherches en science politique sur la place des émotions dans la conquête et dans l’exercice du pouvoir, cette dimension nourrie de blessures et d’épreuves sur le sens de la vie relève de l’indicible en temps normal. Imperceptiblement, Jean‑Philippe Motte nous en offre une version visible, convaincante, simple et déroutante d’humanité. En ce sens, le récit proposé par Pierre Merle dévoile une grandeur intimiste de l’engagement politique qui raconte et qui dépasse le cas de cet homme qui n’aimait pas le pouvoir.Qui était‑il ?Juliette BrumelotÀ l’issue de ce juste portrait de Jean‑Philippe Motte que j’ai côtoyé dans sa période politique de maturité, il était vice‑président à l’habitat et aux gens du voyage à la Metro et j’étais son binôme en tant que responsable de l’habitat, je m’interroge encore sur l’élu qu’il a été.Était‑il un homme qui n’aimait pas le pouvoir ou un homme qui savait pourquoi et comment il voulait l’exercer ? Il a choisi son moment, pour mettre en œuvre ce qui pour lui relevait d’une mission: à la croisée d’un chemin de vie défini par son «moule de départ» dans la vie (famille d’entrepreneurs bourgeoise et chrétienne) et de son expérience universitaire et professionnelle de la sociologie et de ­l’urbanisme où il avait puisé de solides convictions sur la place qu’il souhaitait tenir dans la cité: s’ancrer sur un territoire auprès des plus fragiles et organiser le «vivre ensemble».Était‑il un berger sans troupeau ou son troupeau à lui n’était‑il pas à côté des codes d’une carrière politique classique ? Son troupeau à lui n’était pas fait de ceux qui se retrouvent dans une écurie politique guidés par un besoin d’ego ou de reconnaissance mais plutôt des habitants des quartiers, ceux par lesquels il avait le sentiment d’avoir été élu et vis‑à‑vis desquels il considérait en conséquence avoir une responsabilité dans l’exercice de son mandat.Était‑il un mauvais orateur ou n’avait‑il pas opté plutôt que pour des discours convenus, pour une voix nourrie de l’intérieure à la tonalité parfois laborieuse reflétant une ligne sérieuse et spirituelle ? Comme si sa seule préoccupation était, plus que de défendre ses idées à travers des joutes oratoires, d’argumenter de manière précise afin de convaincre et d’être entendu pour avoir un impact sur l’action de terrain ?N’a‑t‑il pas su utiliser un style bien à lui, homme élégant un peu raide doté d’une capacité et qualité d’écoute hors du commun pour installer des relations de confiance et négocier au plus fin avec un cercle politique large et rassembler au‑delà des clivages aux deux échelles territoriales qui lui tenaient à cœur: celle des quartiers et de l’intercommunalité ? N’était‑il pas à ce titre le seul à pouvoir par son charisme et son capital confiance, fédérer les communes de tous bords et faire exister enfin l’intercommunalité autour d’un programme local de l’habitat exigeant et rassembler les habitants des quartiers populaires autour de projets portés dans le cadre de la politique de la ville ?Oui certes il a bien agacé les courtisans politiques qui lui ont reproché de ne pas savoir décider ou trancher et de donner dans le «consensus mou». Mais au fond ce n’était pas son projet et n’a‑t‑il pas réussi sa mission dans une logique décalée qui lui était propre: ne jamais faire disparaître les vraies amitiés derrière les écuries politiques et tenir ses engagements vis‑à‑vis de ceux qui l’avaient élu. Se servir de la politique plutôt que d’être broyé par elle.Pour un «second couteau», sa trace est belle et unique car elle permet de faire rimer politique avec élégance, cohérence, intégrité et finalement plutôt efficacité. Je suis fière d’avoir côtoyé cet homme libre là, qui a su me convaincre que «politique» pouvait ne pas rimer seulement avec «pouvoir» mais plutôt avec «responsabilité» et qui a su de manière remarquable laisser sa place quand il a jugé qu’il avait été au bout de sa mission. Je tiens à l’en remercier.Ces deux textes inédits sont également téléchargeables dans la rubrique COMPLEMENTS.

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