Promenade parmi quelques demeures

Résumé Fr

La demeure bourgeoise, la maison familiale, la cabane d'enfant, l'appartement ouvrier ou la grotte préhistorique assurent, de manière ambivalente, une protection vis-à-vis du monde extérieur mais aussi une ouverture sur celui-ci. L'habitation peut devenir un refuge, une forteresse impénétrable et son occupant peut, lui aussi, choisir l'isolement ou tout au contraire adopter le rôle d'un voyeur sur le monde qui l'entoure. La place de l'habitat, dont la vocation première reste d'accueillir et d'abriter, ouvre plusieurs pistes de réflexion artistiques et esthétiques. Nombreux sont les artistes qui, depuis le début du XX e siècle, ont questionné, ont remis en cause, en jeu et même en danger, le lieu, que ce soit celui du musée ou de la galerie d'exposition. On propose ici un parcours dans le temps. Une balade chronologique parmi quelques oeuvres (quelques demeures) exemplaires. Elles sont parfois inquiétantes, parfois enchantées, mais toutes conçoivent l'habitat comme matériau d'expression plastique plus que comme simple lieu où vivre. 1/ Merzbau (Kurt Schwitters) Kurt Schwitters débute la création du Merzbau en 1922. Il se trouve alors dans sa maison à Hanovre et commence à assembler, ajuster, entasser et organiser des éléments hétéroclites. La sculpture-construction s'élève et s'édifie dans son propre appartement, et vient ainsi investir directement son habitat familier, son espace intime. Faite de détritus, de matériaux de construction divers et variés, l'oeuvre s'immisce et s'intègre immédiatement dans le quotidien de l'artiste. D'abord conçue sous la forme d'une simple colonne centrale au milieu de son appartement, le Merzbau va se propager, grandir, envahir les murs, le plafond, la cuisine, la chambre, le salon, passer les portes, les fenêtres et déborder dans les étages supérieurs de la demeure allemande. Dès lors, cette action artistique et esthétique est à saisir de plusieurs manières et, bien sûr, ouvre sur des questions essentielles à notre propos.