2016
Cairn
Joel Birman, « Le troisième âge et la nouvelle lecture du vieillir : subjectivation et politique », Psychologie Clinique, ID : 10670/1.g0fbd4
Il est certain que, ces trente dernières années, une autre représentation du processus de vieillissement est apparue dans l’imaginaire social de l’Occident, qui s’oppose dans ses moindres détails à celle qui existait antérieurement. Celle-ci avait été dominante dans notre tradition depuis la fin du XVIIIe siècle. Ainsi, la figure du vieillard a perdu son aspect monolithique et monotone pour se dédoubler en un ensemble de figurations, marqué par la nuance, la différence et la polyvalence. C’est la raison pour laquelle il est tout à fait correct d’affirmer que nous nous trouvons actuellement face à des processus de vieillissement, dans la mesure où la figure de la vieillesse s’est effectivement multipliée en diverses possibilités d’être et d’exister. En effet, avec le déplacement du singulier vers le pluriel, le vieillir a perdu la marque de l’univocité pour être décidément caractérisé par la multiplicité, l’image du vieux s’est transformée et se présente sous de nouvelles formes, modifiant de fond en comble son ancienne condition, aussi bien du point de vue existentiel que social. Bref, pour parodier Henry Jones, un « autre tour de vis » a été réalisé dans l’expérience et la lecture des processus du vieillir, qui occupe maintenant la position grammaticale du pluriel, et non plus celle du singulier, dans la tradition occidentale. Toutefois, cette transformation radicale a impliqué, comme condition préliminaire, une nette augmentation de la durée de la vie, aussi bien chez les hommes que chez les femmes. Chaque année, les recherches épidémiologiques effectuées à l’échelle internationale montrent clairement cette tendance, sûre et irréversible.