2010
Cairn
Cas Wouters et al., « Comment les processus de civilisation se sont-ils prolongés ? : De la « seconde nature » à la « troisième nature » », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, ID : 10670/1.j83gni
Cette contribution se concentre sur les processus de civilisation au 20e siècle, en partant de l’analyse des livres de manières dans quatre pays occidentaux depuis 1890. Elle s’articule à l’étude de Norbert Elias en décrivant comment, sur une phase de longue durée de formalisation des manières et de « disciplinarisation » des personnes, les émotions « dangereuses » telles que celles relatives à la violence physique (y compris sexuelle) en vinrent à être contrôlées de façon de plus en plus automatique. Ainsi, une seconde nature ou un type de personnalité dominée par sa conscience devint dominant. Le 20e siècle céda la place à une informalisation des manières et à une émancipation des émotions : des émotions qui ont été niées et réprimées re(deviennent) conscientes et sont plus largement acceptées selon les codes sociaux. Pourtant, ce n’est qu’après les années 1950 que les standards d’autocontrôle permettent de plus en plus aux individus d’admettre qu’eux-mêmes et les autres puissent avoir des émotions « dangereuses » sans provoquer de honte, en particulier celle liée à la peur de perdre son contrôle et de perdre la face. À tel point qu’il est devenu « naturel » de percevoir les tractions et poussées à la fois de la « première nature » et de la « seconde nature » : une « troisième nature » de personnalité s’est ainsi développée.