Dialogue intérieur et dialogue de l'âme avec elle-même

Résumé Fr

La définition du Théétète de la pensée comme “dialogue de l’âme avec elle-même” suscite un doute quant à l’authenticité “dialogique” de certaines opérations psychiques. Quelle place la forme dialoguée a-t-elle dans l’élaboration de ce que Platon appelle en effet “pensée”, mais aussi dans d’autres opérations moins intellectuelles ? Alors que la “pensée” semble s’opposer d’une certaine manière à des “dialogues intérieurs” qui expriment des conflits psychiques, nous tentons de montrer au contraire qu’il existe une relative continuité entre le modèle archaïque du conflit psychique tel qu’il est mis en scène en un dialogue intérieur et la manière dont Platon envisage plusieurs usages de ce modèle, dont la “pensée” telle qu’elle est définie dans le Théétète est une espèce. En effet, le “dialogue” entre les parties de l’âme tel qu’il est décrit dans la République, mais aussi dans le Phédon ou encore les Lois pour décrire des conflits psychiques, s’il n’épuise pas les caractéristiques d’un “dialogue de l’âme avec elle-même”, en constitue probablement un point de départ, et en est incontestablement un de ses usages dans les domaines éthique et politique. Ainsi, c’est à travers cet écart entre dialogue idéal et un nécessaire dédoublement de soi conflictuel qui caractérise les “dialogues intérieurs” qu’on peut tenter de caractériser les usages pédagogiques du dialogue.