Migration circulaire ou canalisation utilitariste des mobilités? Les programmes demigration temporaire en agriculture intensive vus d’en bas.

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25 septembre 2015

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Frédéric Décosse et al., « Migration circulaire ou canalisation utilitariste des mobilités? Les programmes demigration temporaire en agriculture intensive vus d’en bas. », HAL-SHS : sociologie, ID : 10670/1.oav6mt


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Basée sur deux enquêtes de terrain réalisées dans les champs et les serres de l’agriculture intensive du Sud de la France et de l’Espagne dans le cadre de nos recherches doctorales respectives, cette communication interroge le concept de « migration circulaire » qui s’est imposé à l’échelon international pour promouvoir la diffusion de programmes de migration temporaire (PMT). Vieux patron de ce que Morice nomme le « renouveau de l’utilitarisme migratoire », entendu comme la propension qu’ont les Etats et le patronat de ne penser et de n’organiser le phénomène migratoire qu’à l’aune de sa profitabilité économique [2001], le PMT est aujourd’hui vu comme le remède à tous les maux supposément générés par l’immigration permanente (« légale » ou non). Parce qu’il pose le retour au pays comme une condition a priori et sine qua non pour y participer, ce dispositif cherche à réinventer la roue, la fameuse noria, cette réalité d’un passé migratoire aujourd’hui largement mythifié dont Sayad a souligné la capacité à créer autour du phénomène un consensus entre ses différents protagonistes : « l'image de la migration comme “rotation” continuelle exerce sur chacun un pouvoir fort de séduction : la société d'accueil a la conviction de pouvoir disposer éternellement de travailleurs […] ; la société d'origine croit pouvoir se procurer de la sorte indéfiniment les ressources monétaires dont elle a besoin […] ; les immigrés sont persuadés de s'acquitter de leurs obligations à l'égard de leur groupe » [Sayad 1999 (1977)]. Sur le même mode, à l’OIM, l’OIT ou encore l’OMC, les chantres de la « migration circulaire » affirment, quant à eux, que le PMT est un modèle de gestion win-win-win des mobilités humaines grâce auquel ces dernières ont un impact positif sur le développement des pays d’origine.La communication reviendra tout d’abord rapidement sur la genèse du patron migratoire PMT, ainsi que sur la circulation du concept (au sein du gouvernement des migrations en gestation à l’échelle internationale) et de ses déclinaisons concrètes. Après la déconstruction de cette catégorie et la mise au jour du jeu d’acteurs qui la promeuvent, nous présenterons succinctement nos deux cas d’études : les contrats OMI/OFII en France et les contratos en origen en Espagne. Cette approche par le bas nous amènera à souligner la manière dont les PMT articulent finement la canalisation de la mobilité internationale de la force de travail migrante et son immobilisation sur le marché du travail, une immobilisation qui fait des saisonniers agricoles étrangers un « salariat bridé » [Moulier-Boutang 1998], un salariat dépendant, lié (au sens strict) à un employeur qui seul décide si le travailleur reviendra l’année suivante. A rebours d’une vision transnationaliste qui nous amènerait à interpréter la « société saisonnière » [Hellio 2014] comme le produit d’une libre circulation entre deux territoires, comme un facteur d’hybridation des cultures des pays d’origine et de départ, ou encore comme un monde fluide où l’ « acteur-migrant » omnipotent participe à la mondialisation par le bas, nous insisterons sur l’importance des dispositifs étatiques et patronaux de contrôle des mobilités, tout en rendant compte de la façon dont les migrants « font avec » ces contraintes, résistent et revendiquent (parfois) avec succès leur « droit de fuite » (Mezzadra 2005).

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