2019
Cairn
Annette Ruelle et al., « Le plus absolu des droits, entre désir idéel et idéal d’autonomie. L’invention de la propriété des anciens comparée à celle des modernes », Revue interdisciplinaire d'études juridiques, ID : 10670/1.onoylz
Le renouveau juridique de la pensée du commun se pense explicitement contre la logique propriétaire, et en particulier contre le pouvoir absolu qu’elle confère au propriétaire sur sa chose. Mais ce caractère « absolu » de la propriété (au sens de l’article 544 du Code civil) est-il inhérent à son concept ? Quelle est l’origine de la conception « absolutiste » de la propriété privée ? Cet article cherche à répondre à ces questions en examinant la genèse du concept de propriété privée et de l’absolu qui la caractérise en droit romain, d’où tout est parti, et dans les écrits du père fondateur du libéralisme anglais, John Locke, d’où, dans la perspective du législateur moderne, tout est reparti.Aussi éloignés ces deux univers soient-ils, tous deux demandent à être rendus à leur contexte originaire, exhumés sous les interprétations fossilisées qu’ils engendrèrent, exégèses toujours plus enclines à trouver à la source une manifestation d’elles-mêmes qu’à y découvrir le site d’une technique et d’une réflexion originales, lesquelles continuent pourtant de nous déterminer intimement. La première et la seconde partie de l’article s’attellent donc à présenter l’émergence du concept de propriété privée en contexte, respectivement en droit romain puis dans la modernité anglaise.À un degré d’intégration supérieur, les auteurs mettent ensuite en tension ce contraste entre la genèse romaine et moderne du concept de propriété dans une troisième partie prospective et exploratoire. Quels présupposés, quels implicites la démarche permet-elle de dégager dans l’ordre des représentations relatives à la manière dont se définissent les relations des hommes aux choses dans chacun de ces deux imaginaires, non tant par-delà leurs différences incommensurables que dans le but de mettre l’horizon d’incommensurabilité qui les sépare à l’épreuve ? Sept « contrastes » sont ainsi analysés qui permettent de problématiser la réflexion sur les Communs à partir d’un substrat « propriétaire » renouvelé par l’approche comparative elle-même.