15 décembre 2022
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Anne Dalles Maréchal, « Des robes nuptiales sans noces: Fabrication de vêtements de mariage nanaï, Extrême-Orient de la Russie », HAL-SHS : histoire des religions, ID : 10.4000/tc.18356
Les Nanaï habitent dans la région de l’Amour, à l’Extrême-Orient de la Sibérie, en Russie. Selon les règles d’échanges asymétriques qui régissaient les mariages, en quittant le village paternel, les mariées se séparaient de la protection des esprits du clan de leur père pour se placer sous la protection de ceux de leurs futurs époux. Lors du voyage effectué le jour de la noce, les mariées étaient considérées comme particulièrement vulnérables, car elles ne bénéficiaient plus de la protection d’aucun esprit, et la robe nuptiale permettait de leur apporter une protection sous la forme de broderies. Les mariages nanaï ont été interdits pendant la période soviétique et les mariées ne portent plus cette robe brodée. L’abandon de ces rites n’a pas conduit à la disparition de cet assemblage matériel, au contraire, son efficacité est réinvestie dans d’autres domaines. Les brodeuses gardent cette robe pour leurs propres funérailles et l’arbre de vie brodé dessus est entré dans le discours patrimonial. Étudier cette robe permet d’appréhender son efficacité rituelle et son utilité aujourd’hui, sans les noces, mais aussi d’ouvrir la recherche sur les brodeuses, dont le savoir-faire est condensé dans ces robes. En présentant un corpus de photographies issues d’enquêtes menées entre 2011 et 2015, je me propose de montrer à la fois la complexité de la technicité nanaï ainsi que le lien intime entre matérialité et système de pensée.