Écrire, un passage à l'acte : enquête à travers la pensée et la création contemporaines Writing : an acting-out : investigation through contemporary philosophy and creation Fr En

Résumé Fr En

Ce travail est une enquête sur le fait de se mettre à écrire, saisi dans une série d’œuvres et de trajectoires de pensée récentes. Il court sur une période de plus de cinquante ans, unifiée par l’importance et l’intensité qui touchent le verbe « écrire », entendu désormais intransitivement, et quand le fait même d’écrire acquiert un caractère brûlant, expérimental, existentiel, et une dimension politique. La réflexion part de la conviction que l’on ne naît pas artiste, écrivain.e, créateur.rice, mais qu’on le devient, et que ce devenir peut être pensé à travers une notion initialement théorisée par la psychanalyse : le « passage à l’acte », qui permet d’en souligner à la fois l’intensité, l’événementialité, et la part de risque, de violence, mais aussi de négativité salvatrice. La thèse explore ainsi toutes les dimensions et tous les effets de sens de ce « plus-que-geste » qu’est l’écriture. En prenant appui sur l’analyse d’œuvres et de témoignages d’écrivain.e.s, artistes et philosophes, pour la plupart français, de la seconde moitié du XXe siècle et de la période contemporaine, on entend mettre en valeur la façon dont « écrire », « passer », « agir », « commencer » s’articulent entre eux pour faire de la création une véritable forme de vie. La thèse comprend trois parties : on analyse d’abord la question du commencement proprement dit, en identifiant le cœur palpitant d’un poïen, c’est-à-dire d’une mise en acte artistique en construction permanente. On dresse ensuite une typologie des obstacles auxquels toute œuvre peut être confrontée, des empêchements aux crises, des doutes aux tentatives d’abandon. On définit enfin ce passage à l’écriture comme un véritable art du passage à l’acte, que l’on peut voir à l’œuvre dans le devenir de toute pensée se formulant, comme dans tout processus d’émancipation.

This work is an investigation about the beginning of the act of writing, through a series of recent works and thought trajectories. We will study a period of more than fifty years, unified by the importance and intensity of the verb « to write », now understood intransitively : this act of writing will be considered in a burning, experimental, existential, and political way. The research starts from the conviction that one is not born an artist, writer, creator, but that one becomes one. This becoming can be thought through a notion initially theorized by psychoanalysis : the « acting-out ». This expression will help to underline the intensity and the positive violence of such a creative act. Thus, the thesis will explore all the meaning effects of this « more-than-gesture » that is writing. Based on the analysis of works and testimonies of writers, artists and philosophers, mostly French, from the second half of the 20th century to the contemporary period, we intend to highlight the way in which « writing », « passing », « acting », « beginning » articulate with each other to make art creation a true life form. The thesis consists of three parts: first, we analyze the question of the beginning itself, by identifying the beating heart of a poïen, that is to say, a creative enactment in permanent construction. We then draw up a typology of the obstacles with which any work can be confronted, from impediments to crises, from doubts to temptations of giving up. Finally, the act of writing will be defined as « a true art of acting-out », at stake in the becoming of any thought being formulated, as in any emancipation process.