2020
Ce document est lié à :
info:eu-repo/semantics/altIdentifier/doi/10.48611/isbn.978-2-406-11521-2.p.0185
Philippe Béraud et al., « Hypercapitalisme, l’accélération du Capitalocène: Financiarisation et plateformisation versus infrastructures contributives et internation », HAL-SHS : sciences de l'information, de la communication et des bibliothèques, ID : 10.48611/isbn.978-2-406-11521-2.p.0185
Dire que l’hypercapitalisme est un ordre machinique propre à recréer sans cesse de l’espace marchand à travers les places de marché des plateformes, la valorisation des données et la circulation de contreparties monétaires dérégulées, c’est aussi se poser la question des alternatives possibles et crédibles. Ce qui est en jeu ici, c’est la capacité de s’approprier collectivement les infrastructures numériques. Cette appropriation collective ne peut pas être seulement le fait de communs, défendant le principe d’une autonomie déliée de l’intervention publique. Non seulement l’appropriation des infrastructures suppose la conjonction des forces de la société civile et de l’État, mais elle exige aussi la conjugaison de mécanismes de régulation internationaux. Si la production et la redistribution des richesses doivent changer de main, si l’accumulation doit servir la création collective, comme le préconisait François Perroux, c’est au niveau des institutions de l’internation, au sens de Marcel Mauss, que les efforts devraient être déployés, pour socialiser et développer les infrastructures numériques comme supports de ces richesses et des biens communs.Dans le même temps, la gestion des infrastructures et des services numériques devrait s’opérer dans le cadre d’une économie de la contribution qui ferait converger à l’échelle de l’internation les dynamiques propres aux secteurs publics et privés, et aux formes d’organisation collective, dont les communs mais pas seulement. L’économie de la contribution ouvrirait ainsi la voie à la création d’institutions destinées à favoriser l’innovation, les investissements et les principes de redistribution. En témoigneraient notamment la réintermédiation publique dans les choix de production, la réorientation des investissements vers des activités associant numérique et écologie, un cadre réglementaire renouvelé pour les marchés financiers afin de mieux servir les intérêts de l’économie réelle, ou encore, la constitution d’un droit international unifié soucieux du bien-être des producteurs et des droits de la personne. Le transfert du pouvoir de négociation et de décision à ces nouvelles institutions deviendrait ainsi le gage d’un engagement réellement prioritaire, constructif et coordonné pour contrer les facteurs d’accélération du Capitalocène.