29 janvier 2024
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Fabienne Dugast et al., « Vallée de l’Eure : une rivière, des territoires (Projet collectif de recherche). Rapport intermédiaire 2023 », HAL-SHS : archéologie, ID : 10670/1.rtz59w
Le PCR « Vallée de l’Eure : une rivière, des territoires » s’intéresse au bassin versant de l’Eure, sous bassin du système séquanien, encore assez peu étudié sur le plan archéologique, géoarchéologique et historique. Il se place dans la continuité des grands programmes lancés à partir des années 1990 sur l’étude des dynamiques de peuplement et de l’organisation spatiale des territoires, qui ne cessent de se multiplier pour développer des problématiques autour du rôle des sociétés dans les phénomènes de transmission et de changement des formes spatiales. Il intègre à ce titre au sein de ses réflexions aussi bien des études sur l’évolution de la morphologie des paysages que sur la formation des groupes culturels, pour tenter de mieux comprendre les dynamiques socio-environnementales qu’engendrent au cours du temps les interactions entre l’homme et son milieu, entre les sous-systèmes culturel et naturel.Le projet résulte d’une réflexion sur les réelles capacités documentaires d’un corpus donné en matière de reconstitution évolutive des paysages aussi bien naturels qu’anthropiques et sur les moyens à mettre en œuvre en termes d’efficacité et de pertinence pour pallier la discontinuité et le fractionnement de la donnée, toutes périodes et disciplines confondues. En s’inscrivant volontairement dans un contexte de faible documentation matérielle, le projet ouvre sur une approche exploratoire et prospective, aussi bien sur le plan scientifique que technologique. Au-delà de l’enrichissement du corpus – somme toute maigre – degisements archéologiques et de sites identifiés sur le secteur, il vise à restituer les modalités de la construction des territoires et des patrimoines naturels, culturels et sociaux sur le temps long, en privilégiant le dialogue transchronologique et l’interdisciplinarité. Il met également en place une plateforme Web-SIGoriginale, dont l’objectif est non seulement de centraliser la collecte des données pluridisciplinaires de manière à pouvoir les croiser, mais aussi, en amont comme en aval, à aider à la réflexion et à la décision sur le terrain en matière de connaissance, de conservation et a fortiori d’aménagement et de gestion des risques de notre environnement historique et naturel, passé, actuel et futur.Les actions menées dans le cadre de la première triennale du PCR (2019-2022) s’étaient attachées à combiner, dans une perspective géoarchéologique et multi-scalaire traditionnelle, différentes méthodes de prospections de manière à documenter à l’échelle locale et à dater de nouveaux marqueurs géomorphologiques, archéologiques et historiques de la moyenne vallée de l’Eure. Ces données inédites ont permis de mieux comprendre le contexte d’implantation des installations humaines aux différentes époques au bord du cours d’eau : installations précaires du Néolithique et sanctuaire d’époque romaine au niveau de Garennes-sur-Eure, série d’enclos de types et dates indéterminés au niveau de Saussay/Croth. La génération de logs et de datations a été complétée par des prélèvements effectués plus au nord ainsi que par la reconstitution des trajectoires socio-environnementales au niveau de deux sous-bassins versants en rive droite. Le croisement des regards disciplinaires, entre la géomorphologie et l’archéologie, a fourni ainsi une première image des dynamiques environnementales de l’Eure dans son fond de vallée en lien avec les grandes phases de l’anthropisation de son bassin-versant depuis le Néolithique. Cette première image nécessitait d’être complétée et consolidée par une approche de la rythmicité des dynamiques érosives et la quantification de la redistribution des sédiments au cours de l’Holocène dans des bassins versants secondaires.En parallèle, les traitements cartographiques effectués à partir des données altimétriques fournies par l’IGN (RGE Alti® 5 m et 1 m), avec pour objectif de repérer de probables signaux microtopographiques de l’évolution des paysages due aux aménagements anthropiques et à leur abandon, ont été complétés par les images proches Infra-Rouge Fausses Couleurs (IRFC) de l’IGN. L’ensemble a été vectorisé, permettant d’affiner, de compléter, voire de corriger la première cartographie des marqueurs archéologiques, historiques et géomorphologiques disponibles. Cette image a été enrichie en outre par le traitement des nouveaux levés LiDAR HD® mis à disposition par l’IGN, qui ont permis d’investir notamment les milieux boisés et ainsi de révéler des signaux microtopographiques jusque-là inédits. Par ailleurs, et en résonnance avec les opérations de prospections archéologiques (au sol, aériennes et aéroportées sous drone), ainsi qu’avec la démarche d’inventaire des « géoarchéosites » initiée en 2020, une réflexion méthodologique et exploratoire a été menée en termes de modélisation des formes du paysage et des dynamiques d’implantation humaine. Compte tenu à la fois du corpus de sites archéologiques disponible et de la topographie générale du secteur d’étude, il apparaît peu pertinent de tenter de comprendre l’organisation et l’évolution du peuplement sur la fenêtre d’étude par une mise en réseau appuyée sur la hiérarchisation ou la catégorisation des implantations. En revanche, l’évolution des territoires doit pouvoir se lire à travers le développement des réseaux de communications qui organisent le paysage, dans ses perturbations ou au contraire dans sa pérennité.Enfin, dans la suite des réflexions menées tout au long de l’année 2023, l’équipe projet a convenu que la structure actuelle de la base de données de la plateforme collaborative ne répondait pas aux problématiques de descriptions des dynamiques archéologiques et paysagères combinées sur le territoire d’étude. Ces obstacles tiennent notamment à l’origine des données actuellement présentes, calquées sur la structuration des bases de données des services territoriaux de l’archéologie sur laquelle sont venues se greffer les données acquises en géomorphologie, le tout se surimposant sur les fonds de documents cartographiques de l’IGN. Les discussions ont permis de dégager une nouvelle structure de la base de données permettant d’inclure les observations menées dans le cadre du PCR sur les deux pans disciplinaires engagés : côté archéologique et côté géosciences. Cette structure est actuellement en phase de test.