2022
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Vivien Braccini et al., « Le paradoxe de l'observateur », HAL-SHS : histoire, philosophie et sociologie des sciences et des techniques, ID : 10.5281/zenodo.7447888
La prise en compte de l'observateur est devenue évidente en particulier dans les sciences humaines et sociales, depuis que le sociolinguiste William Labov, ayant eu à demander à ses informateurs de s’exprimer « spontanément » pour qu’il puisse collecter des énoncés « authentiques », en a formulé le problème sous forme d’un paradoxe : pour obtenir les données, il faut observer comment les gens parlent quand ils ne sont pas observés (1973). Ce paradoxe est patent sur le terrain d’une recherche, où le chercheur ne fait qu’observer ; il l’est a fortiori quand la connaissance est étayée sur une action de changement (recherche-action, psychothérapie, etc.) où l'intervenant agit intentionnellement sur la situation qu'en même temps il observe pour s'en construire une représentation, ou quand l'observation est un préalable à une telle action (études sociologiques, enquêtes, sondages d'opinion). Mettre en question l'observateur a le mérite d'obliger les scientifiques à interroger les postulats sous-jacents à leurs méthodes, aux mesures qu'ils choisissent et à l'interprétation des résultats, qui sont autant d'actes et d'énoncés de croyance invisibles, pris dans la construction même des problèmes que la science cherche à résoudre.