2018
Cairn
Denis Guénoun, « Une pensée en jeu de scène », Revue de métaphysique et de morale, ID : 10670/1.wkj9mv
Un spectacle intitulé Aux corps prochains – Sur une pensée de Spinoza (créé au Théâtre national de Chaillot en 2015) se propose de mettre à l’épreuve de la scène la célèbre formule de l’Éthique : « Ce que peut un corps, nul ne l’a déterminé » (III, ii, sc.). Mais il ne s’agit pas, dans cette tentative, de confier à des acteurs des énoncés philosophiques, ni de chercher à les illustrer par la mise en scène. L’expérience consiste à se demander, par des moyens scéniques, de quelle nature est le non-savoir du corps dont cet aphorisme fait état, et comment il peut être engagé dans des actions de la vie ordinaire : se lever, se laver, fuir, fêter, déclarer, actions par lesquelles des corps peuvent manifester une capacité à surprendre radicalement la connaissance qu’on croyait avoir d’eux. Le rapport entre théâtre et philosophie voudrait donc être éclairé ici, non pas à partir de ce que les philosophes ont écrit sur le théâtre, mais en examinant une proposition qui cherche à mettre au travail une pensée philosophique dans la pratique d’un jeu de scène.