5 décembre 2023
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Elise Goutagny, « Les recueillant·es : Pratiques graphiques féministes en France (2012-2022) », HAL-SHS : histoire de l'art, ID : 10670/1.xogpcx
Cette thèse propose une contribution à l’étude des féminismes des années 2010-2020 en France, depuis leurs pratiques graphiques. Elle s'ancre dans le champ du design graphique, tout en entrant en dialogue avec d’autres disciplines, l’histoire contemporaine des féminismes, la sociologie des mouvements sociaux, les sciences de l’information et de la communication. Le corpus est composé de captures d’écran collectées sur Instagram, de notes de terrain, ainsi que d’entretiens avec des créateur·ices de comptes Instagram féministes et des colleur·euses. L’attention portée aux pratiques ordinaires, individuelles, et aux récits qu’en font les féministes interrogé·es nuance la « rapidité » ou « viralité » souvent prêtée aux militantismes sur les réseaux sociaux, et inscrit la pratique graphique dans un temps long. S’intéressant aux manifestations graphiques de la parole féministe, l’enquête distingue deux mouvements : prendre la parole, et la recueillir. Il s’agit de comprendre en quoi la pratique du graphisme accompagne la parole féministe, de la première extériorisation d’un vécu, à la construction d’un discours féministe qui articule témoignage, transmission d’information et visibilisation des violences. Aborder les féminismes contemporains avec les « lunettes » du design graphique, pour reprendre l'expression de Vivien Philizot, c’est accéder à une autre fabrique du féminisme. Cela permet de comprendre comment les discours, les vécus féministes se construisent par la pratique du graphisme : pratique féministe et pratique graphique deviennent alors indissociables. En ce sens, le graphisme ne serait plus un levier ou support des mobilisations, mais une manière parmi d’autres de pratiquer le féminisme.