30 mai 2022
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Jean-Yves Trépos, « L’incidence des visions du monde dans l’écriture des sciences sociales », Revue de l’Institut de Sociologie, ID : 10670/1.y4bnpc
Une étude raisonnée du processus d’écriture des sciences sociales, même si elle écarte tout projet de fixation de normes, se heurte à plusieurs obstacles : à supposer qu’on parvienne à justifier une position dite « épistémologique », il est difficile de mettre en relation d’éventuelles régularités d’écriture avec des appartenances à une école de pensée, des formations disciplinaires ou des générations, sans majorer ou minorer les spécificités du style d’un auteur. Il y a pourtant de bonnes raisons de penser que si l’on arrive à vaincre ces obstacles les résultats de ce travail seront utiles. Entrer dans l’observation de l’écriture par l’examen de ses présupposés pourrait être l’une de ces tâches fécondes parce qu’elle permet de mettre en évidence le réseau complexe de relations qu’une vision du monde installe dans un texte. L’un des fils conducteurs de ces connexions est la construction de la temporalité, parce qu’elle répond à l’état pratique et au moins momentanément, pour les événements et phénomènes que décrivent les textes, à des questions de trajectoires (sont-elles continues ou discontinues ?) et de rythmes (à quelle vitesse convergent-ils ou divergent-ils ?), mais aussi adopte une conception de la causalité (atomisée ou en chaîne, avec ou sans effet de retour ?) et de la texture (qu’est-ce qui fait tenir les entités ?). Loin de constituer des ensembles homogènes de conceptions métaphysiques qui s’imposeraient à l’insu des auteurs comme des lecteurs, ces présupposés doivent être traités comme des ontologies stables mais locales et plurielles.