2019
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Sophie Albert, « Réinventer le Graal au début du XXI e siècle Le calice de doña Urraca (León, Espagne) », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.ymcsvd
En 2014, Margarita Torres Sevilla, professeure d’histoire médiévale à l’université de León, et José Miguel Ortega del Río, historien d’art à Valladolid, publient un ouvrage intitulé Los Reyes del Grial (« Les Rois du Graal »). Cet ouvrage retrace l’histoire d’un calice conservé longtemps à León, capitale de l’ancien royaume de même nom, dans le trésor de la Real Colegiata Basílica de San Isidoro. Les auteur·ices entendent démontrer que ce calice est celui dont usa Jésus-Christ au moment de la Cène, autrement dit le Graal.La réinvention du calice léonais relève d’un entre-deux singulier, entre une référence à une histoire « savante » qui se veut objective, des fictions plus ou moins assumées et des types d’appropriation susceptibles de « faire vivre » le passé médiéval. Pour le montrer, je reviens d’abord sur la translation et la redécouverte du calice de doña Urraca, dont je mets au jour les enjeux politiques et symboliques dans le contexte léonais : outil de l’ascension individuelle de sa principale inventrice, l’objet sert en même temps les intérêts des abbés de San Isidoro et de la ville de León. J’observe dans un second temps la place du calice par rapport à plusieurs espaces du religieux : objet conservé au trésor d’une basilique, il s’éloigne du culte de l’Église romaine pour s’inscrire dans un discours du mystère et de l’occulte autrement moins autorisé. Enfin, j’examine la dialectique entre une rhétorique du caché, du mystérieux et de l’occulte, et des manières de rendre le calice concrètement palpable.