2003
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Jean-François Jacouty, « Robespierre selon Louis Blanc : le prophète Christique de la Révolution française », Annales historiques de la Révolution française, ID : 10.3406/ahrf.2003.2648
Opposant radical à Louis-Philippe, et bientôt révolutionnaire de 1848, L. Blanc est partisan d'une République jacobine et socialiste. Son engagement politique s'appuie aussi sur une Histoire de la Révolution française (1847-1862). Il distingue 1789 de 1793 par l'opposition de deux principes : individualisme et fraternité. Si le premier a favorisé la bourgeoisie, le second devait affranchir le peuple, opprimé et pauvre, mais sans éliminer la bourgeoisie. Dès 1789, Robespierre aurait été quasiment seul, dans la classe politique, à défendre la perspective d'une France authentiquement fraternelle : politiquement unie dans une démocratie égalitaire, socialement solidaire (et favorable aux pauvres), mais aussi liée par l'amour évangé- lique. Robespierre est ainsi l'héritier de Jésus et de Y apôtre Rousseau : sa parole de vérité en fait un vrai prophète. Défenseur de l'Humanité et d'un Droit de Justice, il est populaire auprès des masses et influent aux Jacobins, mais reste politiquement isolé. Même en 1793 il demeure prophète : conscience et guide de la Révolution, il en impose toujours par son verbe, mais le pouvoir lui échappe. N'étant pas le dictateur dénoncé par ses ennemis, il ne peut accomplir la Révolution et empêcher les violences terroristes, si contraires au Droit. Le 9 thermidor marque aussi la fin de la Révolution. L. Blanc y voit une tragédie sacrificielle : la Passion d'un nouveau Christ. Chargeant Robespierre de leurs crimes et d'un despotisme imaginaire, les révolutionnaires renoncent en fait à la Révolution, dont l'Incorruptible incarnait au plus haut l'Idée. Mais le prophète lègue son message aux générations du xixe siècle, à charge de l'accomplir.