2002
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Monik Kervran, « Un monument baroque dans les steppes du Kazakhstan : le tombeau d'Örqina Khatun, princesse Chaghatay ? », Arts Asiatiques, ID : 10.3406/arasi.2002.1478
Le mausolée dit de 'Aysha Bibi, situé à Taraz, au sud du Kazakhstan, a été jusqu'à présent attribué aux XIe-XIIe s. Une nouvelle analyse du monument, basée sur un relevé graphique minutieux, a montré son étroite ressemblance (plan, élévation et composition des façades) avec le mausolée édifié par les Samanides à Boukhara, au IXe s. En revanche, son décor très composite est marqué par quatre traditions décoratives distinctes : la tradition islamique d'Asie centrale, qui se révèle dans la composition décorative des façades et les carreaux de revêtement en forme d'étoile ; la tradition bouddhique, à laquelle le monument emprunte son placage de briques ornementales ; la tradition chinoise, à laquelle il doit les fleurs de pivoines qui ornent ses chapiteaux, enfin l'art des steppes, dont des motifs extrêmement stylisés ornent l'intérieur des plaques de son revêtement. C'est l'emprunt du motif chinois de la pivoine, jamais reproduit en Iran ni en Asie centrale avant le milieu du XIIIe s., qui a livré l'indice chronologique le plus sûr pour dater le mausolée. A cette époque, Taraz appartenait à l'empire Chaghatay et le personnage de cet empire le plus susceptible d'avoir fait ériger ce monument est Örqina Khatun, épouse du Khan Qara Hülegü puis régente du royaume, d'environ 1240 à 1266. La personnalité de cette princesse - une Mongole bouddhiste convertie à l'islam - aussi bien que l'endroit où le mausolée a été érigé - sur l'une des voies reliant l'Asie centrale à la Chine - peuvent expliquer son caractère hybride.