2010
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Dana Rappoport, « L’énigme des duos alternés à Flores et Solor (Lamaholot, Indonésie) », Archipel, ID : 10.3406/arch.2010.4167
L’énigme des duos alternés à Flores et Solor (Lamaholot, Indonésie) Alors que depuis le début du XXe siècle l’Indonésie orientale est un terrain fécond pour les linguistes et les ethnologues, cette aire géographique n’a pas reçu la même attention de la part des ethnomusicologues. Pourtant, au regard de cette aire culturelle, la musique semble offrir un moyen assez précis pour reconstruire l’histoire des contacts entre cultures. Une musique atypique a été découverte à Flores dans les années 1930, puis décrite et enregistrée en partie dans les années 1990. Il s’agit d’un art rare, subtil, encore pratiqué dans certains villages sur une distance de 80 km, de Tana ‘ Ai à Tanjung Bunga (Flores oriental), en passant par l’ouest de Solor. Il est pratiqué par des locuteurs de deux groupes linguistiques : le dialecte tana ‘ ai de la langue sikka et plusieurs dialectes de la langue lamaholot. Appartenant à la famille des langues austronésiennes, la langue lamaholot est parlée par plus de 220 000 personnes occupant plusieurs îles, de la pointe orientale de l’île de Flores aux îles d’Adonara, Solor et Lembata, auxquels il faut ajouter des locuteurs habitant le long des côtes de Pantar et d’Alor. La particularité de cette musique est une forme en duos alternés, combinant une première voix (hodé’) à une seconde voix (nuku), selon des règles précises. Surgissant dans un paysage de musiques pour gongs ou grands choeurs, elle pose une énigme au chercheur car elle fait figure d’isolat. Quelle est son origine ? À partir d’enquêtes de terrain récentes (2006-2007), et grâce à de nouvelles découvertes musicales, il est maintenant possible de suggérer une réponse à cette question. L’article propose une hypothèse de migration, fondée sur des éléments musicaux et d’autres traits culturels. La musique est ainsi utilisée pour comprendre et reconstruire l’histoire culturelle d’une région.