1994
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Louis Pinto, « Le journalisme philosophique », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, ID : 10.3406/arss.1994.3082
Le journalisme philosophique La philosophie, qui bénéficiait jusque récemment de tous les attributs prestigieux d'une discipline savante soumise au jugement des pairs, s'est trouvée de plus en plus exposée depuis les années 60 et 70 à une série de transformations dont l'effet le plus évident est sans doute l'apparition d'un nouveau style intellectuel qui se veut accessible à un large public. Le pôle mondain de la philosophie, s'il ne peut exister ouvertement comme tel au risque de se dénoncer, bénéficie de la multiplication d'instances, de rôles et des situations intermédiaires où coexistent les opposés. Et si le rôle des médias apparaît déterminant dans cette évolution, comme le montre une multitude d'indices (extension des sujets, ton pathétique, etc.), on ne saurait ignorer que la condition même de leur réussite réside aussi dans les caractéristiques internes du fonctionnement de la discipline. Les agents les plus liés à la conservation d'une forme de capital culturel « humaniste », prestigieuse mais menacée par la concurrence, semblent n'avoir d'autre alternative que la défense crispée de l'orthodoxie scolaire ou l'invention d'une philosophie profane tournée notamment vers des sujets d'actualité. Mais comme dans les deux cas, l'enjeu est la perpétuation des privilèges culturels d'une élite de l'esprit, il n'est pas étonnant que les alliances et les alliages tendent à se multiplier entre académisme et journalisme.