1995
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Jennifer Looper, « L'épisode de la Harpe et de la Rote dans la légende de Tristan. Étude sur le symbolisme de deux instruments de musique », Cahiers de Civilisation Médiévale, ID : 10.3406/ccmed.1995.2629
La Règle de saint Benoît, écrite au VIe s., décrit un code moral qui a influencé non seulement le comportement de la communauté monastique du XIIe s., mais aussi celui de la classe guerrière de la même époque. Dans le court épisode isolé de la Harpe et de la Rote qui apparaît dans la version de la légende de Tristan écrite par Thomas, les règles dictées par saint Benoît concernant l'humilité — s'abaisser pour s'élever — sont clairement mises en avant lorsque Tristan retrouve Iseut en jouant de la rote, instrument indigne de son statut social. Dans la version de la légende en moyen-haut allemand écrite par Gottfried von Strassburg, cependant, c'est le ravisseur qui joue de cet humble instrument et Tristan qui joue de la harpe, instrument très valorisant au moyen âge. L'interprétation de Gottfried est-elle l'exemple d'un changement involontaire des rôles des deux musiciens ? Ou bien est-elle une interprétation régionale basée sur le symbolisme de la harpe et de la rote, telles qu'elles apparaissent en pays germanique et non en France ? Dans cet article, nous établirons d'abord le symbolisme de cet épisode en lui appliquant le code de saint Benoît, puis en identifiant les instruments de musique, enfin en comparant plusieurs manuscrits français et allemands pour observer la popularité d'un instrument par rapport à la région dans laquelle il apparaît.