Le Conte du Graal de Chrétien de Troyes, une « œuvre ouverte » ?

Fiche du document

Date

2007

Discipline
Type de document
Périmètre
Langue
Identifiant
Collection

Persée

Organisation

MESR

Licence

Copyright PERSEE 2003-2023. Works reproduced on the PERSEE website are protected by the general rules of the Code of Intellectual Property. For strictly private, scientific or teaching purposes excluding all commercial use, reproduction and communication to the public of this document is permitted on condition that its origin and copyright are clearly mentionned.



Citer ce document

Stéphanie Le Briz-Orgeur, « Le Conte du Graal de Chrétien de Troyes, une « œuvre ouverte » ? », Cahiers de Civilisation Médiévale, ID : 10.3406/ccmed.2007.2973


Métriques


Partage / Export

Résumé En Fr

In Chrétien de Troyes' Conte du Graal, a great power is given to the narrator, who often shows it or even uses it in order to make predictions and to pass his own uncompromising jugdement. However, this obtrusive narrator may fail, for different reasons : either he contradicts himself, or events or characters show that he was wrong, or other characters take the story in charge and make it more precise or more complete. But even these casual narrators may be wrong, so that Chrétien de Troyes seems to have made a point of the following idea : to tell the truth, a global and permanent truth, is quite impossible. Facing up this tough and fundamental question, most of the novelists who wanted to continue Chrétien's Conte during the 13th century completely put aside the authors considerations on truth's relativity : their narrators became absolutely omniscient and got helped by hermits or wizards who could give a single precise and steady sense to every sign. Such conclusions either failed to recognise or rejected the original issue contained in the Conte du Graal. In this novel, the ambiguous position of the narrator and also the choice of a « novel » knight like Perceval herald from the beginning the major importance of mystery, the need to seek the truth (which is subtle and always changing), and actually suggest that the Conte must remain unfinished. To compare Perceval's episodes to Gauvain's episodes reinforces this idea. Better than the famous knight Gauvain, the changing young Perceval allows Chrétien de Troyes to express his original conception of the « voir dire », which does not suffer any certainty. However, the narrative peculiarities of Perceval's episodes may be found in a few Gauvain's episodes too. Thus, none of those heroes seems to be destined to end his own quest, and none of them will end the narrator's quest either.

Dans Le Conte du Graal, le narrateur jouit d'un grand pouvoir, qu'il exhibe fréquemment et dont il s'autorise parfois pour faire des prédictions ou pour émettre des jugements tranchés. Cependant, il arrive aussi que cette voix ferme se trouve prise en défaut, soit qu'elle se contredise, soit que les faits ou les personnages lui donnent tort, soit enfin que d'autres figures viennent préciser ou compléter son récit. Ces narrateurs occasionnels n'étant pas infaillibles non plus, c'est finalement sur la difficulté d'énoncer une vérité générale et durable que semble insister Chrétien de Troyes. Face à cette troublante interrogation, les continuateurs ont souvent réagi de la même manière : pour clore le dernier roman de Chrétien, les romanciers du XIIIe s. ont complètement omis sa réflexion sur le caractère relatif de toute vérité ; ils ont au contraire prêté à leurs narrateurs une omniscience indiscutable et leur ont adjoint des ermites ou des magiciens capables de donner un sens, unique, précis et fiable à chaque signe. De telles clôtures ont méconnu ou rejeté l'originalité du Conte du Graal, un roman où non seulement la position ambiguë du narrateur mais aussi le choix d'un chevalier « novel » disaient par avance l'importance du mystère, la nécessité d'une recherche du vrai, subtil et changeant... et donc l'inachèvement essentiel de l'œuvre. Une comparaison entre les épisodes centrés sur Perceval et les pans du récit consacrés à Gauvain permet de confirmer cette idée. Parce qu'il évolue constamment, Perceval est assurément le personnage qui permet le mieux à Chrétien d'exprimer sa conception singulière du « voir dire », qui ne s'accommode d'aucune certitude. Toutefois, dans quelques scènes, le récit centré sur Gauvain contient ces mêmes particularités narratives, de sorte que, finalement, aucun des deux héros ne semble destiné à terminer sa quête — ni à mettre un terme à celle du narrateur éprouvé par son créateur.

document thumbnail

Par les mêmes auteurs

Sur les mêmes sujets

Sur les mêmes disciplines

Exporter en