2012
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Olivier Biaggini, « Stratégies du paratexte dans les œuvres de don Juan Manuel », Cahiers d'Études Hispaniques Médiévales, ID : 10.3406/cehm.2012.2281
Cet article considère les stratégies du paratexte dans les oeuvres de don Juan Manuel selon deux perspectives complémentaires. D’une part, il tente d’examiner l’évolution formelle des prologues manuélins afin de montrer qu’ils élaborent une figure de l’auteur qui occupe une place de plus en plus centrale dans l’énonciation et dans la rhétorique de justification du projet littéraire. Au sein de cette évolution, il semble qu’un pas décisif soit franchi lorsque l’auteur, s’émancipant du modèle d’écriture alphonsin, adopte la fiction comme principe de composition de ses oeuvres (du Libro del cavallero et del escudero au Conde Lucanor), comme si ce principe de distanciation favorisait l’émergence d’une voix propre. D’autre part, l’article suggère que l’affirmation énonciative et rhétorique de l’auteur va de pair avec un transfert – d’abord ponctuel, ensuite plus massif – des fonctions du paratexte au texte proprement dit : de façon de plus en plus nette, le corps du texte intègre des discours réflexifs et accueille en son sein la figure semi-fictionnelle de don Johán, vers laquelle convergent diverses stratégies d’autolégitimation de l’acte d’écriture. Dans les oeuvres les plus tardives (Libro infinido, Libro de las armas) qui, loin des oeuvres fictionnelles précédentes, se dotent d’une véracité testimoniale, tout l’effort rhétorique se concentre sur cette figure du moi, dont le pouvoir énonciatif se fonde sur une expérience personnelle et une continuité lignagère providentielles.