1982
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Marie-Louise Pelus, « Marchands et échevins d'Amiens dans la seconde moitié du XVIe siècle : crise de subsistances, commerce et profits en 1586-1587 », Revue du Nord, ID : 10.3406/rnord.1982.3852
En 1586-1587, la ville d'Amiens, aux prises avec les difficultés des Guerres de Religions, est touchée par la très grave crise de subsistances qui s'abat sur l'Europe occidentale, conjuguée de surcroît avec une nouvelle offensive de la peste. Si les documents émanant de l'échevinage laissent entrevoir l'extrême misère des classes populaires, ils montrent surtout quelle fut l'attitude de la bourgeoisie marchande qui domine l'échevinage. Si leur premier souci est de maintenir l'ordre public, les échevins se préoccupent dans un second temps — avec beaucoup de retard — d'acheter, en Picardie d'abord, puis à Dan- zig, des grains destinés à être vendus à prix réduit «au pauvre peuple». Les comptes de ces achats de grains montrent que la préoccupation philanthropique n'exclut nullement la recherche du profit : en dépit de la crise, les affaires ne cessent pas pour autant, et le commerce des subsistances leur procure — juste récompense des risques encourus ? — de substantiels bénéfices, malgré la vente en-dessous du cours, malgré leur peu d'expérience du grand commerce international. Comme les grands seigneurs de Picardie, qui ces années-là, écoulent leurs stocks à prix d'or, marchands et échevins d'Amiens, profitant de l'occasion pour arrondir leurs patrimoines fonciers, apparaissent donc comme les bénéficiaires de la crise.